R.H.E.F.

Mlle Perrin poursuit l'entreprise inaugurée en 1975 avec Laberthonnière et ses amis, et toujours selon la même formule : un choix de lettres, groupées par thèmes, classés eux-mêmes dans un ordre approximativement chronologique. Le premier volume s'arrêtait en 1916, celui-ci nous mène de cette date à la mort de l'Oratorien. Il documente ainsi des épisodes déjà connus : ses relations avec le pasteur Boegner, sa « collaboration », après la mesure qui le condamnait au silence, avec Mgr Chapon et surtout avec le P. Sanson pour les célèbres carêmes de Notre-Dame. Il éclaire d'un jour nouveau le débat avec Blondel et la rupture de leur amitié. Publiant leur Correspondance philosophique (Seuil, 1961), Claude Tresmontant avertissait qu'il avait « écarté tout ce qui relevait de polémiques personnelles ne comportant pas un intérêt philosophique direct », discrimination qui pouvait laisser songeur l'historien. Dans ce qui subsistait, le côté Blondel était manifestement privilégié. Nous entendrons mieux maintenant l'autre voix - solution d'infortune malgré tout, puisque la dureté des temps ne permet plus de procurer des correspondances « générales » et intégrales. Après des échanges entre Laberthonnière et des correspondants d'horizons divers, nous sont présentés deux derniers épisodes dramatiques : la condamnation d'Édouard Le Roy et un ultime « avertissement » romain qui amène un duel épistolaire assez pénible avec le Supérieur de l'Oratoire, le P. Brillet.
Ce livre fournit donc, comme le signale le préfacier, un dossier utile pour « l'histoire des idées et de la vie religieuse pendant la Première guerre mondiale et la douzaine d'années qui l'a suivie ». Il nous aide surtout à comprendre comment l'épreuve que l'on sait a encore accentué deux traits apparemment contradictoires de ce personnage hors-série : ouverture ad extra, mais ad intra intransigeance qui ne s'embarrasse pas de précautions oratoires. Incidemment, il se reconnaît deux « modèles » : Jeanne d'Arc et Savonarole.