La plupart des étudiants de philosophie, aujourd'hui, n'ont jamais entendu parler de Maurice Blondel. C'est vrai, indiscutablement, malgré les études faites sur ce grand philosophe. Un ostracisme assez curieux perdure à son encontre. Gageons que ce livre, actes d'un colloque, lui sera bénéfique. La quête du sens caractérise très justement « ce qui rapproche Maurice Blondel et Gaston Berger », d'abord entre eux et ensuite sur nos propres questions. N’est-il pas urgent « de sauvegarder à l'intérieur de la démarche philosophique », une certaine tension, une quête, mieux qu'un dogmatisme, vers un être, une vérité, une valeur qui puisse donner un sens à l'existence humaine ? La philosophie est en fait une incitation à conserver sa personnalité, c'est-à-dire à édifier une nouvelle critique de la raison pratique. Cependant la réalisation de celle-ci n'est pas si simple. La thèse de Maurice Blondel, en 1893, l'Action, heurtait de fait les positions tenues depuis longtemps par les philosophes français qui se réclamaient de Kant. L'analyse de l'existence humaine, appelée action, irréductible à la théorie, aboutit à l'insuffisance de notre existence, ce qui nécessite un recours à la foi religieuse. Le scientisme fin de siècle ne pouvait admettre cette solution. « On ne peut résoudre le problème moral de la personnalité et de la destinée humaine par la spéculation seule » « Il faut réserver à la vie même ce qu'elle apporte d'insurmontable. » La spéculation doit s’incliner devant l'action, c'est-à-dire l'existence. La religion a sa propre logique, et l'étudier philosophiquement, c'est analyser l'intelligibilité de la religion, L'infini est le terme du vouloir, de même que le surnaturel, ce qui implique la méthode d'immanence. Que de controverses au sujet de cette méthode, que Maurice Blondel appelle lui-même logique de l'action, Cette méthode correspond à l'argument philosophique qui constate le désaccord des philosophes entre eux, établissant de manière rationnelle la nécessité de la foi. L'exigence de la fin surgit au niveau de la raison en exercice. La transcendance se découvre dans l'immanence. Nous trouvons ainsi le sens, la valeur au milieu de l'existence, afin de dépasser la morale dans une éthique qui soit une vérité en donnant un sens à l'existence, dans une philosophie intégrale, donc toujours ouverte. Maurice Blondel reconnaissait les faiblesses de sa position. Qu'est-ce qu'une foi rationnelle sans rationalité ? Les critiques se firent multiples. Les interventions de ce colloque jettent de vives clartés sur le projet blondélien, l'un des plus originaux du XXe siècle.