SOCIÉTÉ DE L'HISTOIRE DU PROTESTANTISME FRANÇAIS, novembre 1992

J. Gres-Gayer est un prêtre qui enseigne à l'Université catholique de Washington. Il a impeccablement édité les lettres échangées entre d'une part, William Wake, archevêque de Cantorbery, William Beauvoir, pasteur anglican et, de l'autre, deux docteurs de Sorbonne, Louis Ellies Du Pin et Patrice Piers de Girardin. Les textes sont en français, en anglais et en latin selon les cas. Une excellente introduction (p. 1-40) éclaire le contexte historique et analyse l'évolution des efforts iréniques des participants qui recherchaient un rapprochement entre l'anglicanisme et un gallicanisme, exacerbé alors par la résistance janséniste à la bulle Unigenitus. Ce conflit à l'intérieur de l'Église de France était bien fait pour susciter des illusions à l'étranger et laisser naïvement croire possible une rupture des gallicans avec Rome. On voit dans ce livre des hommes de bonne volonté, authentiquement désireux d'unité chrétienne, proches par leurs compétences en matière d' histoire de l'Ancienne Église et qui apprirent à se faire confiance jusqu'à un certain point et à s'estimer. Tout cela n'en aboutit pas moins à un fiasco. En effet le quiproquo est constant : Wake conçoit l'unité comme une Union des Églises chrétiennes (un peu ce qu'esquisse de nos jours le Conseil œcuménique), alors que les gallicans désirent ramener les schismatiques sous l'autorité de Rome : l'échec était inéluctable. Il serait fâcheusement anachronique d'en tirer des conclusions pour la situation actuelle, ne serait-ce, d'ailleurs, que parce que le contexte politique est radicalement différent. Nous avons dans le présent livre une étude historique, d'une impressionnante érudition (annotation méticuleuse, bibliographie imposante, index détaillé) qui documente avec précision l'avortement d'une tentative prématurée, tout à l'honneur cependant de la piété chrétienne de ceux qui y ont participé.