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BAP n°27 RECHERCHES DANS LA FOI. Trois études sur Origène, saint Antelme et la philosophie chrétienne

BAP n°27 RECHERCHES DANS LA FOI. Trois études sur Origène, saint Antelme et la philosophie chrétienne

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Date d'ajout : lundi 02 mai 2016

par Jacques DOYON

REVUE : Laval théologique et philosophique, vol. 36, n° 3, 1980

L'auteur a réuni dans ce volume trois études écrites à quinze ou vingt ans d'intervalle. La première, sur la philosophie chrétienne, remonte à 1936 et nous replonge dans les discussions avec Gilson, Maritain et Blondel, le plus actuel des trois étant Blondel, auquel on retourne de plus en plus, Elle vient en dernier dans le volume, peut-être parce qu'on y suit la chronologie des auteurs étudiés. On y pose la question, que l'auteur prétend être toujours actuelle, de l'existence et de la pertinence d'une philosophie chrétienne pour tenir vraiment compte du réel dans toutes ses dimensions, en particulier de cette réalité majeure et centrale qu'est l'Incarnation du Fils de Dieu et de ses conséquences sur la totalité. Gilson reconnaît le fait historique de la philosophie chrétienne, i.e. née de la foi, un peu comme Platon est né de l'orphisme. La philosophie, en effet, rationalise une intuition qui a son origine dans une histoire particulière. « Elle n'enfante pas sans avoir été fécondée. » - Maritain, de son côté, distingue le révélé qui est accessible à la raison, mais difficilement, et le révélé proprement surnaturel. Pour ce qui est du premier, la révélation chrétienne a été d'un grand secours à la philosophie, en donnant une place centrale aux notions de personne, de liberté, d'existence, de service, d'amour, etc… Le révélé proprement surnaturel demeure un au-delà de la philosophie, réservé aux seuls théologiens. - Blondel va plus loin, il montre que l'exploration du mystère de l'homme, introduit au cœur de la démarche philosophique elle-même le vœu de son dépassement et l'attente d'une révélation possible. Cette perspective a été maintenue et prolongée (l'auteur y fait peu référence) par des penseurs tels que Rahner et Schillebeeckx, lesquels reprennent l'étude de toutes les réalités humaines en montrant cette dimension d'attente et d'ouverture sur un au-delà, sur le transcendant, à tel point que Rahner appelle .. existencial surnaturel» cette attente jamais assouvie qui définit l'homme profondément. L'étude de l'auteur, qui manifeste sa préférence pour la perspective de Blondel, ne suit pas la piste ainsi ouverte, piste qu'il connaît d'ailleurs fort bien: par exemple, ses études sur Teilhard de Chardin. Il me semble que Marcel Légaut est aussi de cette école. Si cet article qui date des années trente avait été repris et complété, il aurait pu prendre la direction que nous venons d'indiquer; tel quel, il demeure vraiment incomplet.
Le deuxième article, portant sur Origène, a été esquissé dans ses grandes lignes en 1950. C'est, il me semble, le plus original et le plus actuel. La question du « mensonge utile », connue de Platon et de Bouddha, est posée à propos de Dieu. Lui, qui est l'entière vérité, nous instruit-il et nous guide-t-il au moyen de mensonges utiles ? Origène se pose cette question à propos de Jérémie 20,7: « Tu m'as séduit Seigneur, et je me suis laissé séduire. » Après avoir longuement et subtilement analysé la pensée d'Origène, l'auteur en vient à dire que les paroles de l'Écriture qui, à première vue, et interprétées au pied de la lettre semblent fausses, visent cependant une vérité essentielle, quand on dépasse l'anthropomorphisme, l'analogie pédagogique. Ainsi la colère de Dieu n'est pas comme la nôtre. Elle est son amour qui veut notre correction et notre guérison, si nous savons profiter des conséquences néfastes de nos erreurs et de nos fautes pour nous convertir. Les peines dues au péché sont toujours médicinales, comme le remède qui guérit, la correction paternelle pédagogiquement nécessaire. Certains en ont conclu qu'Origène prêchait l'apocatastase et la non-existence de l'enfer éternel, puisque, selon lui, la colère de Dieu et ses punitions ne sont pas éternelles, mais toujours médicinales. L'apocatastase a été la doctrine de Grégoire de Nysse et, plus tard, de Pic de la Mirandole, mais certainement pas d'Origène, comme l'auteur nous le rappelle à la suite de quelques autres spécialistes d'Origène. Selon Origène, quand l'amour de Dieu a épuisé ses moyens pour la conversion de quelqu'un, y compris les peines médicinales, attribuées à sa colère, il l'abandonne à lui-même, à sa décision libre et irrévocable. L'enfer éternel, c'est le silence dernier, l'oubli où l'on n'est « ni absout, ni condamné, mais perdu ».
Le chapitre sur saint Anselme est lui aussi très actuel. Le projet d'Anselme était, comme théologien, d'aller de la foi à la vision. Il cherche donc à voir ce qu'il croit d'abord, par une recherche rationnelle dont il espère qu'elle le fera de plus en plus s'approcher de la pleine connaissance et de la possession de Dieu. Mais cet effort, accompli avec une rigueur qui prépare Thomas d'Aquin, ne le satisfait pas, « car ce n'est pas finalement par la voie de l'intelligence que Dieu est trouvé, mais par la voie de l'amour ». Cette « docte ignorance » est découverte au terme d'une recherche rigoureuse et géniale sur l'existence et les attributs de Dieu qui occupe les deux tiers du Proslogion ; elle n'est donc pas la voie la plus facile. Mais elle est le plus bel hommage que l'intelligence laborieuse et humble peut rendre à son créateur, Dieu plus grand que tout. Thomas d'Aquin trouvera lui aussi au terme de sa vie que son œuvre n'est que de la paille, quand approche le moment de la vision, qui éclaire l'âme de ses premières lueurs. Plus tard, Nicolas de Cues et Jean de la Croix tiendront le même langage. Chez Augustin la recherche dans la foi était toute entière habitée par l'amour et faisait goûter l'objet tout en l'analysant. Pourtant, même lui termine ses recherches sur la Trinité par un aveu d'impuissance. Anselme est satisfait de sa recherche; il a trouvé réponse à ses questions, mais son Dieu est toujours absent. Il tient un discours sur Dieu quasi parfait pour son époque. Mais ce discours ne lui donne pas Dieu. L'idéal de la connaissance amoureuse s'étant disloqué, la recherche intellectuelle et rationnelle part de son côté, avec ses catégories, ses abstractions ; l'amour est ainsi séparé, avec son besoin d'union réelle et concrète. Une conséquence de la spécialisation ! Une bénignité de Dieu, qui se révèle aux humbles.
Ces trois essais ont beaucoup en commun ; ils laissent entrevoir un au-delà de l'intelligence et de la rationalité dans lequel habite le mystère : qu'il s'agisse du mystère « du silence dernier de Dieu pour ceux qui sont perdus à jamais », du mystère de Dieu, ineffable, que « l'œil n'a point vu, ni l'oreille entendu et qui n'est point monté jusqu'au cœur de l'homme », ou du mystère de l'homme que la philosophie soupçonne, mais qui la dépasse et appelle une révélation.


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