RIVISTA DI STORIA E LETTERATURA RELIGIOSE, ANNO XXII, 1 1986

Il est audacieux de présenter l'impact de la Bible sur tous les temps. L'examen critique des siècles au cours desquels les livres bibliques ont été écrits requiert des bibliothèques, qu'en sera-t-il du cheminement de ces livres au travers des Églises, des peuples et des âges ? Beauchesne s'est accordé sept gros volumes pour tenter cette synthèse. II, « Le monde latin antique », est confié à J. Fontaine et Ch. Piétri ; III, « S. Augustin », à A. M. La Bonnardière ; V, « Les Réformes », à M. Venard et d'autres ; VI, « Les lumières », à B. Plongeron et d'autres ; VII, « Le monde contemporain », à C. Savart et J. N. Aletti. Noms prestigieux.
L'Occident est favorisé, d'autant que le vol. 1 est relativement bref. Les nombreux collaborateurs, dont chacun dispose de 20 à 40 pages, sont normalement des savants chevronnés, qui communiquent à un large public l'acquis de leurs travaux spécialisés, mais il y a aussi des jeunes qui consacrent à une zone obscure une recherche neuve, fructueuse. Il n'est pas toujours aisé de définir quel public ils visent ; je ne sais si j'exprime une opinion commune, en confessant que l'exposé est d'autant plus intéressant qu'il est techniques et nourri de découvertes originales.
Le vol. IV, visiblement élaboré en collaboration, offre une réelle unité, posant de nouveaux problèmes qui stimuleront les chercheurs. Les auteurs sont en partie américains, mais ils sont à l'aise dans les bibliothèques de Paris. Je signale les monographies sur les Bibles glosées (G. Lobrichon), sur l'histoire des Concordances verbales (M. A. et R. H. Rouse, Los Angeles), sur la place de la Bible dans les bibliothèques, d'après les inventaires (P. Petitmengin, maître du sujet) et sur les révisions du texte latin (L. Light, Los Angeles : exploration pleine de promesses, tiré de l'autopsie de manuscrits peu connus, plus que de l'étude des éditions critiques).
Dans la section d'histoire de l'exégèse, J. Verger nous révèle les méthodes universitaires; bien entendu, sur les carolingiens ou les écoles du XIIe s., P. Riché et J. Châtillon dessinent aisément une synthèse. La section consacrée au gouvernement des hommes passe en revue Règles et Coutumiers, Collections canoniques, les experts en droit, les dirigeants politiques eux-mêmes. Du côté de la pastorale, imagerie et hagiographie ont droit à des exposés copieux, avec un appendice, si l'on peut dire, pour les Apocryphes ; contributions érudites à la prédication, tant en langue vulgaire qu'en latin, et à la liturgie (point de vue formel chez P. M. Gy, exemples savoureux chez J. Dubois). On aurait pu rattacher à la pastorale l'étude originale de L. K. Little (Northampton, Mass.) sur la révolution commerciale, celle d'A. Vauchez sur les confréries, et même celle de R. E. Lerner (Evanston) sur les mouvements hérétiques évangéliques.
L'Occident étudié ici est surtout le Nord de la France et l'Angleterre, aux dépens du monde méditerranéen, sauf dans le précieux article d'A. Graboïs, fort isolé, sur l'exégèse rabbinique, qui couvre heureusement toute une tradition ignorée. Le vol. I, au contraire, ne semble guère tenir compte des « temps juifs », sinon pour un article de P. Lamarche sur la Septante (qui néglige l'histoire de cette version dans les manuscrits) et un autre de R. Arnaldez sur Philon. L'histoire du texte du Nouveau Testament n'est donnée, ni dans ses recensions, ni dans ses versions orientales. J. Guillet, W. Rordorf, 1. H. Dalmais et M. Simon traitent rapidement, mais de points de vues heureusement divers, de la Bible à la naissance de l'Église, dans les premières communautés, dans les anaphores, dans la controverse avec les Juifs. Puis défilent Clément, Irénée, les marginaux de l'orthodoxie, et Celse - rien sur Origène, sans doute censé connu. Puis les martyrs, les inscriptions, le premier art chrétien - avec un long excursus, d'un vif intérêt, sur les peintures rupestres, plus tardives, de Cappadoce. Les exposés sur Grégoire de Nazianze et sur Théodoret sont classiques ; les idées de Kannengiesser sur la crise arienne sont originales, mais elles devront être démontrées ailleurs. G. Dorival fait une synthèse neuve de ses travaux passés et à venir sur le passage des Commentaires aux Chaînes exégétiques.
Le choix est dû sans doute aux collaborateurs qui se sont trouvés disponibles, plutôt qu'à un plan systématique. Mais on est heureux de finir par deux études sur Jérusalem, centre de pèlerinages bibliques (P. Maraval) et modèle œcuménique d'un lectionnaire enraciné dans les lieux saints et les basiliques (Ch. Renoux, avec utilisation des documents arméniens et géorgiens).