Editions BEAUCHESNE

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TH n°044 L'ABBÉ MARET

TH n°044 L\'ABBÉ MARET

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Date d'ajout : mardi 18 avril 2017

par Jacques GADILLE

RECHERCHE ET DOCUMENTATION DU CENTRE, 1980

Le second titre qui vient de paraître, inaugure une nouvelle collection qui vient doubler la série « Théologie historique »; dirigée par le P. Kannengiesser. Les éditions Beauchesne y annoncent, entre autres, la publication des pièces de la condamnation de Lamennais ; une édition critique de l’Évangile et l’Église de Loisy. Émile Poulat salue cette nouvelle série comme le signe d’un recours reconnu nécessaire, même en histoire religieuse contemporaine ; à une édition critique des documents ; nécessité que pour sa part, il a toujours ressentie et rigoureusement pratiquée. Dans le cas de la thèse de l’Abbé Bressolette ; le document constitue beaucoup plus qu’une illustration ou qu’une justification. Ce cours de Sorbonne de Maret sur « les rapports de l’Église et de la civilisation » en forme le complément indispensable et l'achèvement.
C’est là, en effet, que le professeur de dogme de la Faculté de Théologie de Sorbonne construit dans un système théologique cohérent les bases de la première démocratie chrétienne dont il avait développé les thèmes majeurs dans les colonnes de son journal L’Ere nouvelle, au jour le jour des événements de 1848. Or cet engagement était lui-même le fruit d’une pensée théologique qui s’était définie au cours des débats précédents dans les années 1840.
Ces deux volumes constituent donc un ensemble qui, pour la première fois, présente une pensée qui fut reçue en son temps comme très originale et en donne une analyse « patiente », textes à l’appui Cl. Bressolette éclaire toutes les composantes des années de formation de ce prêtre, ordonné à la veille de la Révolution de 1830 : enfant des montagnes de la Lozère, ce pays de foi solide et de fidélité, il reçut au contact de son père, « l’un des magistrats les plus savants et les plus respectés de la Cour de Nîmes » une première formation, nourrie de nombreuses lectures personnelles qu’il poursuivit durant son éducation sacerdotale. Formation classique, mais aussi ouverture à la pensée contemporaine que favorisera l’influence de l’abbé Frere Colonnaï supérieur de Saint Nicolas du Chardonnet, un ancien polytechnicien, adepte de la philosophie du progrès. A Saint Sulpice et après son ordination, le jeune Maret fut un mennaisien enthousiaste qui, avec l’abbé Sibour, alors dans le Gard, mit en place une antenne pour la région cévenole, de l’Agence générale pour la liberté religieuse. Ses fonctions de vicaire dans une grande paroisse parisienne lui permirent de participer à l’intense mouvement intellectuel des débuts de la Monarchie de Juillet, spécialement dans les milieux catholiques : cours d’histoire et de philosophie de la Sorbonne, leçons de Gerbet sur la philosophie de l’histoire à Juilly, fondation des Annales de philosophie chrétienne de Bonnetty et de la Revue européenne par l’équipe du premier Correspondant. Comme l’a montré Jean René Derré, un séjour à Munich, dans les cercles illustrés par Goerres et Doellinger, était dans la logique de ce mouvement Ce séjour de près d’un an Outre-Rhin et Outre-Monts en 1840-41., suivit la parution d’un Essai sur le panthéisme qui attira l’attention du nouvel archevêque de Paris, Mgr Affre, décidé, dès lors à confier à son auteur l’une des plus importantes chaires de la Faculté de Théologie de la Sorbonne. De fait Maret devait en devenir la principale illustration, au cours d’un décanat de plus de trente ans, à partir de 1853, qui faisait suite à un premier enseignement d’une douzaine d’années. Aussi bien les républicains attendirent par déférence pour lui, pour la supprimer en 1886, la mort de celui qui lavait en quelque sorte incarnée.

C’est pour Cl. Bressolette l’occasion d'analyser ce qui fit la fragilité de ces Facultés de Théologie de l’État créées par le fondateur de l’Université dans le cadre du décret du 17 Mars 1808. En vain Maret demanda-t-il pour elles une part dans la formation du clergé et l'investiture canonique de leurs grades. Des mémoires successifs furent envoyés à Rome, en 1845 et 1854, ou présentés devant le Concile provincial de 1849, auquel il participait comme membre de la Commission des études ecclésiastiques, présidée par Dupanloup. Du moins, ces projets furent le moyen de définir la personnalité de ces institutions, comme des centres « d'un haut enseignement chrétien » qui, s’ils ne pouvaient délivrer de grades canoniques, proposaient à des laïcs et à des clercs un enseignement théologique en français, visant à établir un lien avec l’enseignement universitaire et les représentants de l’État. Un auditoire dépassant les deux cents, au moment ou fut donné ce cours, et ou se mêlaient aux jeunes des journalistes et des prêtres, consacra le succès de ce dessein, à son service, le théologien apportait les qualités reconnues d’une pensée ferme et d’un grand talent oratoire
Cette défense des Facultés de théologie de l’État procédait d’un souci plus profond, qu’il ne cessa de manifester celui de parvenir à réconcilier l’Église avec la culture et la société modernes, issues du XVIIIe siècle et de la Révolution. Or, à l’encontre de la majorité des catholiques libéraux, il ne pense pas qu’une telle réconciliation soit synonyme de « conciliation », ou le résultat d’un quelconque compromis : pour être vraie, elle ne pouvait être que le fruit d’une démarche théologique nouvelle,
L’élaboration de celle-ci est minutieusement exposée .Elle participe au débat central du XlXe siècle sur la dialectique des rapports entre foi et raison. C'est en défenseur résolu de celle-ci qu’il se pose, face à l’éclectisme universitaire dont il dénonce le « panthéisme », et face au traditionalisme de Bonnetty. Ce dernier va jusqu’à lui retourner le qualificatif de « panthéiste », pour avoir fait de la raison pense-t-il, une faculté dépendant directement de la lumière divine. C’est que Maret avait exactement assimilé les critiques de Gerbet contre le traditionalisme mennaisien qui condamnait la raison à une impuissance radicale et distinguait mal nature et surnature. Dignité de la raison humaine et nécessité de la révélation divine : tel est le titre son grand œuvre de 1856. Cette position d’équilibre entre l'exercice autonome de la raison et la justification qu’elle puise dans le recours à la tradition chrétienne fait à ses yeux, l’originalité de l’« École de Paris » quil entend faire revivre : il reconnait pour ses maitres S. Thomas et Bossuet retenant du premier article de la Déclaration de 1682 la nécessaire distinction des pouvoirs qui respecte l'autonomie du pouvoir temporel, dont par ailleurs il récuse le caractère absolutiste.
Maret passe naturellement du plan philosophique à celui de la politique ou de l’ecclésiologie, par une démarche analogue. La doctrine de la première démocratie chrétienne, que formulent les articles de l’Ère nouvelle et que systématisera le cours de 1850 1851 repose sur le double constat que la démocratie est d’abord fondée en raison comme l'aboutissement d’un constant « progrès » de l’histoire, et que cette raison politique est jugée la plus proche des impératifs moraux de liberté spirituelle et de dignité humaine contenus dans la révélation chrétienne. La Tradition en apporte la confirmation, même si depuis le IVe siècle, d’autres types de relations entre les pouvons théocratie, pouvoir indirect de l’Église, enfin contrôle concordataire par L’État paraissent avoir été consacrés par la longue durée. Mais cette longévité ne contredit pas la légitimité de la quatrième formule, celle de la séparation légale et de l’alliance morale, sous le Signe de la liberté, formule qui n'a jamais été désavouée et qu’il préconise. Ainsi s’établit avec force et clarté une théologie politique qui réalise pleinement son objectif à plus long terme, l'harmonisation entre la société issue du XVIIe siècle et de la Révolution et l’Église Nous avons affaire ici en effet, non à un compromis fragile et bourré de sous-entendus ou nostalgique du retour à quelque chrétienté modernisée, idéal inavoué des tenants de « l’hypothèse », Cette pensée politique se fonde plutôt sur une dialectique serrée sur un appareil logique que vient corroborer la tradition chrétienne la plus sûre, il abandonne la référence au système de Bonald pour en appeler à Suarez et Bellarmin, mais sans toutefois qu’il soit possible d’affirmer si sa conviction optimiste d’une action de l’Esprit « animant et enseignant la société humaine » relève d’une théologie de l’Esprit Saint clairement exprimée Voilà ce qui donne au catholicisme libéral de Maret et de la poignée de ses disciples sa touche originale Il implique un nécessaire dialogue de la théologie avec les sciences et a pour corollaire la réforme intérieure de l’Église, dans le sens des institutions conciliaires et collégiales : le doyen de la Faculté de Théologie de Sorbonne fut ainsi le premier, dès 1848, à recommander la réunion d'un Concile général, celui qui siégera au Vatican en 1869-70
Certes, cet idéalisme politique subit l’épreuve, à la fois des tendances ultramontaines majoritaires qui s’affirmèrent à Vatican I, puisque le livre Des Conciles généraux dut être retiré de la circulation après 18707 et de l’anticléricalisme militant de la législation laïque qui devait avoir raison de la Faculté de Théologie elle même. L'auteur donne une brève esquisse de cette déconvenue des dernières années, dans son second ouvrage Mais la force de persuasion du texte de 1850 continue à exercer sa séduction sur nous, comme elle l’exerça sur les jeunes de son temps et quelques uns de ses collaborateurs laïques, députés à l'Assemblée de 1848, les Pradié, les Chevé, les Arnaud de l’Ariège, témoins de la première démocratie chrétienne


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