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01- L'EGLISE ET L'ETAT, COURS DE SORBONNE INEDIT (1850-1851)

01- L\'EGLISE ET L\'ETAT, COURS DE SORBONNE INEDIT (1850-1851)

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Date d'ajout : mardi 18 avril 2017

par J. GAUDEMET

REVUE HISTORIQUE DE DROIT FRANÇAIS ET ÉTRANGER, vol. 58

Grand connaisseur de la pensée et de 1’action de l’abbé Maret, qu’il a fait échapper au petit monde des spécialistes par une thése de Sorbonne soutenue en 1975, Claude Bressolette publice aujourd’hui, avec un appareil critique qui comblera les plus exigeants, un cours professé par Maret a la Faculté de théologie de la Sorbonne en 1850 et 185 1. Cours bref en « huit leçons », arrêté plus tôt que ne l’aurait souhaité son auteur, devant les contraintes d’une « extrême fatigue ».
Une large introduction, nourrie par la thèse sur Maret, situe l’homme, ses tendances, son action. Disciple de La Mennais (dont il se sépare en 1831) par enthousiasme démocratique autant que par adhésion a l’infaillibilité pontificale, Maret, fermement acquis à l’idée de liberté, voudrait que l’Église, rompant avec un conservatisme trop lié au pouvoir politique, instaure sur de nouvelles bases ses relations avec l’État. Sa « démarche théologique, remarquable par sa liberté, son assurance, son effort d’inventer » (p. 49) fait de lui un marginal, en avance sur son temps, donc un homme discuté, attaqué, à qui Pie IX refusera l’évêché de Vannes pour lui conférer 1’évéché in partibus de Sura.
Dans un style moins emphatique qu’on aurait pu le craindre en ce milieu du XlXe siècle, avec une « grande rigueur dans la logique de sa démarche, l’ancien Sulpicien développe son propos : instaurer entre Église et État « une séparation légale et politique », assortie d’une « union, morale dans la liberté ». Deux traits frappent dans sa démonstration, sa profonde confiance dans la liberté, recours constant et justification suprême, et son appel incessant a une Histoire, qu’il connaît bien et qu’il ne sollicite pas pour éclairer son propos, étayer ses critiques ou ses espoirs. Sans doute voit-il 1’Histoire avec des yeux de moraliste, usant volontiers des termes de déclin, décadence, ruine ou, à l’inverse, de progrès. Mais i1 n’est pas seul a vouloir « qualifier » les temps, plus soucieux de décerner éloges ou blâmes que d’expliquer les causes profondes de leurs oscillations.
Peut-être consolera-t-il les angoisses de notre monde en qualifiant le sien» d’ « époque de crise formidable » (p. 85). C’est en pleine conscience de cette « crise », qu’il cherche des voies nouvelles pour résoudre un problème aussi vieux que l’Église chrétienne. Pour cela il estime nécessaire de faire cesser « le divorce de l’Église et de la liberté » et de reconnaître 1e « principe chrétien de la dignité et de l’égalité humaine » source, selon lui, de la liberté et de l’égalité civile et politique (p. 86-87).
L’analyse théorique, que confirment les réalités de l’Histoire, propose quatre solutions aux relations de l’Église et de l’État. Trois leçons (2, 3, 4) exposent les trois premières, que Maret récuse, tandis que les trois suivantes (5, 6, 7) développent sa propre thèse et que la dernière recherche dans l’Histoire 1a place faite a la tolérance et à la contrainte.
La première option est celle de la théocratie, que Maret refuse au nom de la liberté. Il rejette les doctrines du pouvoir direct, indirect, ou directif, et affirme sa liberté de refus, malgré les exemples historiques ou les arguments doctrinaux. Il s‘agit en effet, dit-il, du « terrain de la libre opinion », ou le théologien est habilité à exposer ses vues propres (p. 111). Et ce n’est pas le seul passage où Maret affirme nettement la zone de liberté du théologien, encore qu’une telle attitude n’ait pas pu lui faire que des amis.
Hostile à une domination du pouvoir ecclésial sur l’autorité politique, Maret ne rejette pas moins celle de l’État sur l’Église. Thèse des « Protestants, Richéristes, Jansénistes » dit-il, auxquels i1 associe « la théorie des anciens Parlements », en évitant soigneusement le terme de gallicanisme.
Moins fâcheux le régime de « l’alliance légale et politique » où « distinction et indépendance réciproques » se combinent avec « un accord » entre les deux pouvoirs. C’est, au dire de Maret, le système qui a souvent prévalu du IVe au XVIIIe siècle, quand « le monde n’était pas préparé a la liberté ». Il aboutit a une « religion d’État » et a une « Église politique » et emporte - ce qui le condamne - « une grande restriction de la liberté ». Il s’accompagne aussi d’une trop fastueuse richesse de l’Église et de l’exercice par les instances religieuses de pouvoirs temporels (en particulier judiciaires), ce qui est également déplorable. Ne trouverait-on pas une illustration - mais aussi une condamnation - d’un tel régime dans la curieuse déclaration de l’évêque d’Hermopolis, membre de l’Académie française, pair de France, grand maître de l’Université et ministre de Charles X, lors de la discussion de la loi du sacrilège (1825). « Il ne s’agit pas de savoir si la religion est vraie, il s’agit de savoir si elle est nationale » __ (cité p. 160) ?
A ces trois régimes, fondés sur la contrainte, s’oppose « l’ordre nouveau de séparation légale et d’union morale dans la liberté », dont Maret espère le prochain triomphe.
Il observe, et l’on appréciera la profondeur de l’analyse qui ne s’arrête pas aux apparences du droit, que « malgré le Concordat de Messidor, c’est une Séparation qui l’emporte en France ». Car, depuis 1789, « l’État ne reconnaît plus la vérité, la divinité de l’Église catholique ». Il n’y a donc plus d’ « union dogmatique... Le Concordat est une union de police générale, administrative et financière, d’intérêt très secondaire ». Il « n’empêche pas qu’il y ait séparation dogmatique, séparation légale et politique » (159). Et c’est par la liberté qu’il faut refaire une « union Dogmatique ».
Doctrine libérale que Maret n’est pas seul, dans l’Église de France, a défendre. Mais qui compte plus d’adversaires que d’adeptes et que Rome, un instant tentée, n’est pas prête a cautionner. Maret se heurte ici, sans les nommer, aux catholiques ralliés au « parti de l’ordre ». Il doit démontrer que la liberté de pensée ne se confond pas avec l’athéisme, ni même avec l’indifférence et qu’elle fonde au contraire « l’incompétence de l’État en matière religieuse ». Toute une leçon (la sixième) rappelle les divisions qui opposent les catholiques sur ce point, tandis qu’une autre (la septième) témoigne de la sensibilité de Maret aux « incalculables souffrances qui pèsent... sur la classe la plus pauvre et la plus nombreuse ». Maret y affirme que « l’Union dans et par la liberté » servira au rapprochement entre les « classes élevées » et les masses populaires et contribuera ainsi a secourir les plus malheureux.
L’épreuve des faits permet de mesurer combien les espoirs de Maret étaient excessifs, combien aussi sa confiance sans limite en la liberté était imprudente. On n’en demeure pas moins frappé par la finesse des analyses, la juste appréciation desdonnées de l’Histoire. Et l’on doit remercier Cl. Bressolette d’avoir apporté ses soins à faire connaitre le témoignage d’un homme généreux et enthousiaste.


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