Editions BEAUCHESNE

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TH n°100 L'ÉXÉGÈSE DE THÉODORET DE CYR

TH n°100 L\'ÉXÉGÈSE DE THÉODORET DE CYR

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Date d'ajout : mercredi 19 août 2015

par Benard POUDERON 1997

Ce fort volume est la refonte d'une thèse de doctorat d'État soutenue en 1975 devant l'Université de Lyon II. L'enquête, qui ne portait primitivement que sur le Commentaire sur Isaïe de Théodoret (édité par le même auteur dans la collection des Sources Chrétiennes, nos 276, 295 et 305), a été élargie à l'ensemble des commentaires de Théodoret. Le résultat est à la hauteur de cette lente maturation. C'est en effet une somme monumentale que nous propose J.-N. Guinot, qui ne laisse rien dans l'ombre d'un sujet jusqu'ici quelque peu délaissé.
Le titre est un peu trompeur : car c'est bien de la méthode herméneutique de Théodoret que traite l'auteur, qui s'est fixé comme objectif de faire apparaître l'unité de cette méthode, et d'en révéler la portée théologique et polémique. Un premier chapitre situe d'abord l'entreprise de Théodoret dans son œuvre, dans sa vie, puis dans l'histoire de l'exégèse (pp. 35-76); puis un second (pp. 77-124) et un troisième (pp. 125-165) définissent les principes sur lesquels Théodoret appuie son exégèse : le caractère sacré de l'inspiration prophétique, qui fait du prophète le porte-parole de Dieu, et l'unité de l'inspiration des textes scripturaires, qui oblige à considérer toute écriture comme inspirée, au sein d'un ensemble jugé cohérent. C'est alors seulement que l'auteur s'attache à la méthode exégétique de Théodoret : dans un quatrième chapitre (pp. 167-252), il met en évidence l'extrême souci porté par l'auteur à la critique textuelle; l'évêque de Cyr, qui utilise la Bible d'Antioche (une version de la Septante parfois appelée « recension lucianique »), confronte souvent son texte aux autres versions : le texte hexaplaire de la Septante, ce qu'on appelle les « trois versions » (Aquila, Symmaque et Théodotion), vraisemblablement connues indirectement par une Bible glosée, et plus rarement l'hébreu ou le syriaque (un problème sur lequel l'A. s'est penché plus particulièrement) ; et s'il en relève les variantes, il ne s'agit pas pour lui d'établir un texte critique, mais de permettre une meilleure intelligence du texte, d'en donner une première explication.
Puis l'auteur s'attache à montrer les options fondamentales de la méthode exégétique de Théodoret (chapitre V; p. 253-322) : les présupposés de lecture, à savoir l'inspiration des textes scripturaires, qui impose le respect du texte dans sa littéralité; leur pleine signification, qui oblige l'exégète à trouver un sens à chaque texte ; l'explication de l'A.T. par le N.T. (la perspective messianique ou « néo-testamentaIre. »); le respect du contexte et de l'ακολουθια. La préface de l’ln Psalmos fourntit les pnnclpes directeurs : Théodoret rejette à la fois l'usage excessif de l’allégorie et un attachement exclusif à la littéralité dans un historicisme étroit (la perspective « vétéro-testamentaire »). Ainsi se trouvent justifiés les trois grands types d'exégèse auxquels il a recours : littérale (sous forme de paraphrase du texte biblique, pour lever les ambiguïtés, ou celle d'une explication historique) ; figurée ou métaphorique (nous dirions allégorique) - la seule lecture qui permette par exemple de justifier le caractère inspiré du Cantique des cantiques - ; et typologique. Le chapitre VI (pp. 323-464) nous montre l'exégète au travail : structure du commentaire ; auxiliaires de l'interprétation (grammaire et stylistique) ; rôle privilégié accordé à l'histoire; intérêt pour la géographie et les autres sciences et techniques; critères du choix entre les différents types de lecture (p. 459 : « le refus de l'interprétation vétérotestamentaire ou typologique est presque toujours commandé par la critique historique ou littérale du texte »). .
Les deux chapitres suivants (VII: pp. 465-562; et VIII : pp. 563-629) montrent comment les commentaires de Théodoret « sont le lieu d'une polémique de caractère proprement exégétique qui l'amène à rejeter non seulement l'interprétation des Juifs et celle des hérétiques, mais parfois celle-là même que donnent de l'Ecriture (certains) des exégètes chrétiens ». Et si la polémique contre les hérétiques semble viser, dans un combat un peu dépassé, les gnostiques, Sabellius et les monarchianistes, ou encore les ariens, elle s'enracine en fait dans la querelle christologique du Ve siècle ; Théodoret prend parti pour la double nature : « dès l'instant où il reconnaît la portée messianique d'un passage scripturaire, (il) l'apprécie en fonction du critère suivant : tout ce qui est de l'ordre humain est à rapporter à l'humanité du Christ ; tout ce qui dépasse l'homme relève de sa nature divine » (p. 598) - faisant ainsi « ressortir du texte scripturaire, à la fois comme une évidence et une nécessité, la présence dans le Christ de deux natures distinctes » (p. 603).
Le dernier chapitre (IX : pp. 631-799) est essentiel : J.-N. Guinot part à la recherche des sources de l'exégèse de Théodoret. Relevant tous les emplois que Théodoret fait dans ses commentaires de l'indéfini τινες pour désigner ses devanciers, il les identifie de façon très convaincante. Parmi ses modèles, chez les « alexandrins », Origène, dont il a peut-être utilisé directement le Commentaire sur le Cantique (contra : M. Simonetti; cf. pp. 643-4), et plus encore, Eusèbe de Césarée, par l'intermédiaire duquel il semble avoir recueilli l'essentiel de l'héritage origénien (contra : P. Nautin, à propos de l'ln lsaiam ; cf. p. 250); chez les « antiochiens », Diodore de Tarse, Théodore de Mopsueste et Jean Chrysostome, dont il est l'héritier spirituel. Toutefois, s'il partage avec les antiochiens une même méthode d'interprétation, en accordant la priorité au sens littéral et historique, il s'écarte d'eux par la visée : « Théodoret donne à son texte une orientation nettement néo-testamentaire et cherche à mettre en évidence le caractère messianique des textes de l'A.T. », allant jusqu'à la « contestation du maître » (à savoir Théodore) : « il y a tout lieu de croire que Théodoret désigne Théodore autant que Diodore, quand il déplore l'attitude de certains exégètes chrétiens, apparemment plus soucieux de fournir des armes aux juifs (i.e. par l'intermédiaire de l'exégèse judaïsante qu'est l'interprétation .vétérotestamentaire) que de confortent les enfants de la foi par une I.ecture chrétienne, c'est-à-dire messianique, des Ecritures ». Une ample conclusion (pp. 801-828) dresse le bilan de la recherche, définissant la méthode herméneutique « moyenne » de Théodoret, une synthèse des exégèses alexandrine et antiochienne, qui refuse à la fois de faire la part trop belle à l'allégorie et de s'enfoncer dans un littéralisme étroit, et montrant en lui un pasteur soucieux de ses ouailles, un théologien engagé (p. 820), et un homme doté d'une « hauteur de vues suffisante pour échapper à tout dogmatique et à tout esprit de système» (p. 828). Cinq annexes fournissent le matériel de la recherche : versions bibliques et critique textuelle, terminologie exégétique ; lexicographie; polémique; christologie.
La lecture de cet immense travail fut passionnante de bout en bout, et ne décevra pas les lecteurs à venir. L'apport de J.-N. Guinot, tant en ce qui concerne la définition de la « voie moyenne » choisie par Théodoret, que l'identification de ses sources, fait de sa thèse ainsi remaniée la plus belle des synthèses sur la méthode herméneutique de Théodoret, et un outil remarquable pour ceux qu'intéresse l'histoire de l'exégèse.


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