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TH n°098 DORMITION ET ASSOMPTION DE MARIE. HISTOIRE ET TRADITIONS ANCIENNES

TH n°098 DORMITION ET ASSOMPTION DE MARIE. HISTOIRE ET TRADITIONS ANCIENNES

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Date d'ajout : lundi 25 janvier 2016

par Henri-M. GUINDON

REVUE : LAVAL THÉOLOGIQUE ET PHILOSOPHIQUE, juin

Près de 50 ans après la proclamation du dogme de l'Assomption et les nombreuses études qu'il a suscitées depuis, voici un ouvrage qui nous apporte le fruit d'une longue recherche doctorale sur la littérature apocryphe chrétienne et les traditions anciennes sur le « sort final de Marie », expression qui recouvre les deux notions doctrinales de « Dormition et Assomption ».
Malgré l'abondance de sa documentation, l'auteur, très modestement, n'entend pas donner ici « un bilan définitif ». « À supposer qu'il existe une conclusion à l'objet de ce travail, son temps n'est pas encore venu » (p. 653), D'ailleurs, comme il l'écrit : « il s'agit essentiellement d'un travail préliminaire à une édition et une étude critique des écrits sur le sort final de Marie » (Introduction, p. 1). Même si l'exploration en ce domaine comme en toute recherche scientifique n'est jamais terminée, ce qui nous est donné dans ce volume de 716 pages nous est extrêmement précieux et le lecteur est vraiment en possession de tout ce qui est actuellement accessible à ce sujet.
Ces traditions anciennes, antérieures au VIIIe siècle, s'alimentent à deux sources, l'une littéraire et l'autre topologique, La première puise en des récits, des fragments, des homélies et des lettres ; la seconde concerne les lieux saints de Palestine et d'ailleurs, les sources liturgiques et archéologiques aussi bien que les guides et les récits de pèlerinages qui offrent une riche information. L'auteur privilégie l'expression « topologique » à celle de « topographique », « La raison principale d'un tel choix est qu'au XIXe siècle, le substantif "topologie" ainsi que l'adjectif "topologique" étaient utilisés, dans un contexte religieux, pour désigner la connaissance des lieux et particulièrement la connaissance des lieux saints » (p. 358-359),
La première partie traite des traditions littéraires, c'est-à-dire du regroupement des textes relatifs au sort final de Marie. C'est en somme l'histoire de la dormition et de l'assomption de Marie. Ces textes nous sont parvenus en syriaque, grec, copte, arabe, éthiopien, latin, géorgien, arménien, slavon, vieil irlandais, vieil anglais, vieux français. Soixante-deux ont été retenus, appartenant à huit traditions littéraires, soit les huit premières langues nommées ci-dessus, les traditions occidentales irlandaises, anglaises et françaises dépendant directement de la tradition latine. Chacune de ces huit traditions littéraires est longuement étudiée sur un nombre de pages variant suivant l'importance de la tradition. La grecque, à elle seule, en compte une soixantaine, la latine une quarantaine.
La connaissance des données topologiques complète celle des sources littéraires et fait l'objet de la deuxième partie de l'ouvrage qui se divise en cinq chapitres de longueur très différente, Le premier, qui couvre à lui seul 100 pages (p, 371-471), regarde la liturgie mariale de Jérusalem à l'époque byzantine. L'auteur se limite uniquement aux traditions mariales situées à Jérusalem et dans ses environs, notamment celles relatives à la dormition et à l'assomption de Marie.
À ce sujet, cinq traditions se présentent, soit la tradition de la maison de Marie à Jérusalem, dans les murs à Bethesda ; ou hors les murs à Gethsémani ; la tradition de la maison de Marie à Bethléem, plus exactement à mi-chemin entre Jérusalem et Bethléem au lieu dit « Kathisma » ; la tradition de la maison de Marie à Jérusalem, dans les murs à Sion, enfin la tradition sur le tombeau de Marie à Jérusalem, hors les murs à Gethsémani. À noter que la tradition de Bethesda se rapporte plutôt à la nativité de Marie et non à la dormition ou à l'assomption.
À cette tradition topologique s'ajoute une tradition liturgique. Celle-ci apporte des éléments non négligeables pour la connaissance des traditions mariales tant littéraires que topologiques. L'étude de ces sources fait appel à plusieurs disciplines et domaines très spécialisés : liturgie, archéologie, épigraphie…, « L'étude des traditions topologiques nécessite donc une approche pluridisciplinaire et par conséquent une collaboration entre les spécialistes des divers domaines (notamment les liturgistes et les archéologues) » (p. 369).
Même si le centre d'intérêt demeure toujours Jérusalem et les environs, l'enquête s'étend nécessairement à d'autres pays mais, de toute façon, à l'Orient. La liturgie mariale d'Orient a influencé celle de l'Occident. Il y eut d'abord, à la fin du VIe siècle, dans le cadre de l'Octave de Noël, une messe où Marie, de par son rôle à l'Incarnation, est au premier plan ; la fête de la Présentation, venue d'Orient, apparaît vers 645 dans la liturgie romaine, elle revêt un caractère plus mariologique que christologique, et prend le nom de Purification de Marie, qui prévalut en Occident jusqu'à ce que la liturgie post-conciliaire lui ait restitué son premier nom. Paul VI disait que c'est une mémoire conjuguée du Fils et de la Mère, c'est-à-dire « la célébration d'un mystère du salut opéré par le Christ, auquel la Vierge fut intimement unie » [Exhortation apostolique sur le culte marial, 2 février 1974, n° 7.]. Les fêtes de la Dormition vers 650, puis de l'Annonciation et de la Nativité, sont adoptées entre 670 et 690. Le Pape Serge ne les a pas, comme certains ont pensé, instituées, mais seulement codifiées par décret.
La fête de la Mémoire de Marie qui a pour objet principal de célébrer la maternité divine de Marie est la première commémoration liturgique mariale apparue dans l'histoire. Son origine est liée au mystère de l'Incarnation de Jésus. Elle est célébrée à des dates différentes suivant les régions, mais en Palestine, à Jérusalem notamment, le 15 août, on célébrait la fête de la Mémoire de la Théotokos, ce qui est attesté par la documentation liturgique et homilétique et a donné vraisemblablement naissance à la fête de la Dormition, Elle n'est certainement pas étrangère non plus au développement de toutes les autres fêtes mariales, de la fête de l'Annonciation, Elle disparaît à la suite du développement de la fête de la Dormition et de l'Assomption (p. 432).
La tradition de Jérusalem sur le tombeau de Marie. Cette tradition, tant dans les sources littéraires que non littéraires, le place dans la vallée du Cédron, au pied du Mont des Oliviers, au lieu dit « Gethsémani », « Depuis quand localise-t-on cette tradition à Gethsémani ? » (p. 549). La datation de l'apparition de la tradition du tombeau de Marie permettrait d'une certaine manière de dater l'apparition de la doctrine de l'assomption. « L'association entre la tradition du tombeau et cette doctrine apparaît, en effet, plus évidente si l'on songe que c'est en montrant un tombeau, et tout particulièrement un tombeau vide, qu'on a pu suggérer l'idée que le corps de Marie, et non seulement l'âme, était monté au ciel. Ce type de raisonnement en faveur de Marie ne fait que reprendre celui tenu au sujet de Jésus. Le parallélisme entre l'ascension de Jésus et l'assomption de Marie était sans aucun doute un paramètre important dans la mentalité des théologiens du VIe siècle » (p. 551).
La tradition d'Éphèse sur la maison et le tombeau de Marie. Tout comme la tradition de Jérusalem, la tradition d'Éphèse comporte deux éléments : le tombeau et la maison, tous deux d'époque récente : fin du XVIIIe siècle pour le tombeau et fin du XIXe siècle pour la maison. C'est Sébastien Le Nain du Tillemont (1637-1698) qui, le premier, relance cette thèse déjà avancée par 8aronius au XVe siècle. Ses arguments ont été réfutés depuis longtemps. Du point de vue littéraire, aucune tradition ancienne ne situe le tombeau de Marie à Éphèse, Jean serait parti à Éphèse après la mort de Marie. Du point de vue archéologique, dans les ruines de l'église d'Éphèse où s'est déroulé le Concile de 431, on n'a jamais décelé aucun vestige relatif ni au tombeau de Marie ni à celui de Jean.
De ce qui ressort de ces textes, diverses croyances apparaissent que l'auteur précise de la façon suivante, 1) La doctrine de la dormition sans résurrection. Marie serait morte comme tous les autres êtres humains. Mais son corps préservé de la corruption a été enterré dans un tombeau ou transporté ailleurs en un lieu précisé ou non précisé et son âme attend au ciel la résurrection générale. Cette doctrine « de la dormition sans résurrection pourrait être considérée comme la conception la plus ancienne » (p. 17). Il est à remarquer que l'on insiste toujours, dans ces écrits, sur le fait que le corps de Marie n'a pas subi la corruption. 2) La doctrine de la dormition et de l'assomption. « II s'agit d'un état de transition entre la doctrine de la dormition, plus ancienne, et la doctrine de l'assomption, plus récente. » Ce qu'il y a de particulier dans ces textes, c'est qu'ils contiennent des éléments relevant de la croyance à la dormition et à celle de l'assomption sans jamais confondre l'une et l'autre. La preuve, c'est que dans certaines liturgies, comme la liturgie égyptienne ou éthiopienne, les deux sont séparées par un intervalle de 206 jours. 3) La doctrine de l'assomption avec ou sans résurrection. Certains textes affirment que Marie est sortie de son corps, que son âme est montée au ciel, que son corps également a été transféré au ciel après trois jours et, au paradis, le corps et l'âme ont été réunis. Mais il n'est jamais question de résurrection. De fait, ces écrits soutiennent l'immortalité de Marie. D'autres textes enseignent que Marie, après son départ de la terre, a été transférée, en corps et en âme au ciel, où elle a été ressuscitée.
II ne faut pas oublier que l'Antiquité chrétienne n'aborde pas la question mariale comme les théologiens d'aujourd'hui. On a remarqué avec raison que le mystère de Marie fut « plus vécu que discuté dans les premiers siècles ». Ce qui explique que la proclamation dogmatique de l'Assomption ait laissé ouverte la question de la mort ou de la non-mort de Marie, en raison de l'opposition de certains théologiens que l'on dénommait, pour cette raison, « mortalistes » ou « immortalistes », bien que les récits anciens insistent généralement sur le passage de Marie par la mort. Et même certains théologiens modernes, classés plutôt dans le camp des « immortalistes », ne nient pas la mort de Marie, mais pensent seulement « que le fait de la mort de Marie n'est certain ni du point de vue historique ni du point de vue théologique. »
Ces trois doctrines correspondent à trois périodes de l'histoire des traditions relatives au sort final de Marie. Mais comme l'évolution d'une doctrine va du moins complexe au plus complexe, celle de la dormition est antérieure. Elle est moins élaborée que celle de l'assomption. Elle affirme la mort de Marie tandis que l'assomption soutient soit son immortalité soit sa résurrection.
Au terme de ce long ouvrage, mené avec toute la maîtrise souhaitable dans l'analyse d'une immense documentation, 41 pages de bibliographie couvrent tout ce que cette matière peut offrir à date.


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