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DESTINS DE FEMMES, DÉSIR D'ABSOLU. Essai sur Madame Bovary et Thérèse de Lisieux

DESTINS DE FEMMES, DÉSIR D\'ABSOLU. Essai sur Madame Bovary et Thérèse de Lisieux

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Date d'ajout : dimanche 21 février 2016

par Sylvie GROPPER

REVUE : BULLETIN DE L'ASSOCIATION DES PROFESSEURS DE LETTRE, 86

Micheline Hermine, agrégée de Lettres Modernes, est enseignante du secondaire et romancière. La Préface de son ouvrage par Michelle Perrot, historienne éminente, atteste du sérieux de cet "essai" auquel l'Avertissement en tête du livre confère un caractère scientifique par l'indication des références précises des éditions utilisées de Gustave Flaubert (éditions de Madame Bovary, plans et scénarios, correspondance) et de Thérèse de Lisieux (manuscrits autobiographiques, mais aussi ses Derniers entretiens rapportés par ses proches).
Michelle Perrot pose bien le problème de ce rapprochement qui peut paraître incongru. "Comment comparer une créature romanesque construite par Flaubert à partir de ses perceptions et de ses intuitions de la condition des femmes, à laquelle il prête des sentiments et invente un destin tragique et scandaleux, à une jeune fille réelle, pur produit d'une petite bourgeoisie de province normande, entre piano et dévotions, devenue par le Carmel une des saintes les plus populaires de France, qui nous parle d'elle à la demande de son entourage, (...) dans des récits autobiographiques écrits dans la tradition religieuse pour la connaissance de soi, l'édification des autres et la gloire de Dieu ? La différence de statut, des sources et des personnes ne pose-t-elle pas problème ?"
La Préface de Michelle Perrot commente donc cette comparaison qui peut paraître insolite entre ce personnage qui valut un procès à Flaubert et cette jeune fille touchée par la grâce "pôles apparemment si contraires de la féminité", pour montrer en fin de compte la pertinence d'un tel rapprochement aux frontières du réel et de la fiction.
Emma et Thérèse appartiennent à l'air d'un temps, de l'intertextualité des œuvres et des vies, dans le domaine de l'amour et du désir. L'une et l'autre, la pécheresse et la sainte, rêvent d'amour fou, fusionnel, ineffable et ne se résignent pas à la plate réalité, à la grisaille quotidienne. Excessives et impuissantes, elles en meurent et ces destins sont identiques dans leur disparité apparente.
Michelle Perrot a été sensible au style de l'auteur autant qu'au sujet et à la perspicacité dont elle fait preuve dans ces études croisées. J'ai moi-même apprécié le lyrisme avec lequel Micheline Hermine dépeint ses deux héroïnes à côté d'une rigueur scientifique certaine dans l'approche des textes. Sa grande culture littéraire ne la limite d'ailleurs pas au rapprochement entre les textes cités, elle lui permet des ouvertures sur d'autres écrivains de l'Antiquité à nos jours. Ainsi à propos de Flaubert et d'Emma ou de Thérèse ou à propos de leur vision de la femme, elle cite Aristote ou Platon, Molière ou Cervantès, Baudelaire et Mallarmé, Rimbaud et Verlaine ou même Bernanos et Sartre ou Mario Vargas Llosa… Elle rapproche de manière très judicieuse ses deux héroïnes d'autres héroïnes de théâtre ou de romans et rejoint Virginia Woolf sur son idée de l'espace vital pour la femme.
Dans la première partie de son livre, qui en comporte trois, Micheline Hermine imagine une petite biographie dc ses deux héroïnes à partir de leur "Enfance" et de leurs "Lectures". Sa deuxième partie, intitulée "N'importe où hors du monde" analyse les rapports au monde de ces deux "Cendrillons" et leur passion, ou leur "vocation" pour l'Amour humain mais excessif jusqu'au mystique. Car les deux femmes ont le goût du mystique. Ainsi, comme l'affirme très justement l'auteur : "le procès de Madame Bovary est aussi linguistique que moral. Il juge surtout cc glissement incessant des mots et des représentations provenant de la mystique vers le langage amoureux. Mais, inversement, dans toute la tradition mystique, le langage iconographique et littéraire est violemment érotisé". (p. 155) "Toutes deux, affamées de langage, croient à la brûlure des mots et elles s'y consument […] Suavité, extase, félicité, baisers […]. Le Cantique des Cantiques miroite à l'horizon d'imaginaires vibrants". (p. 155).
Dans la troisième partie de son livre : "Femmes", Micheline Hermine fait voir "à quel prix dans les profondeurs de leur chair et de leur âme" Emma et Thérèse ont choisi le Désir et d'autres vies rêvées plutôt que la réalité: "Mal dans leur temps", "Mal dans leur corps", "Mal dans leur âme", tels sont les titres des trois chapitres qui la constituent, fin d'une quête autour de ces deux êtres de Désir, qui aboutit à celte conclusion entre poésie et raison: "En elles, le Désir se consume en délectation mortelle d'une quête infinie".
Ce livre, remarquablement écrit et documenté, peut passionner.


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