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03- DE LA JUSTICE DIVINE ET DE LA JUSTICE HUMAINE

03- DE LA JUSTICE DIVINE ET DE LA JUSTICE HUMAINE

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Date d'ajout : mardi 02 mai 2017

par Bernard ROUSSEL

REVUE D'HISTOIRE DES RELIGIONS, 1984,3

L'impact de la pensée et de l'action de H. Zwingli a été grand dans le royaume de France entre 1525 et 1545. Mais la mort de Zwingli en 1531 d'abord, puis les corrections apportées à sa pensée comme l'inclusion du modèle zwinglien d'institutions et de rites dans d'autres « systèmes » mieux défendus et diffusés ont conduit plus tard à une méconnaissance souvent profonde du « réformateur zurichois » en milieu francophone. Après avoir traduit, en 1953, la Brève instruction chrétienne, J. C. contribue à lever le voile d'une ignorance accrue par les difficultés de l'allemand et du latin du XVIe siècle, limitée cependant par quelques monographies et articles.
Il s'agit ici du texte édité le 30 juillet 1523, qui amplifie un sermon prononcé quelques semaines plus tôt dans la cathédrale de Zurich. Ce n'est pas un « traité » : c'est un écrit de circonstance prononcé entre deux disputes décisives dans l'histoire religieuse de Zurich et de la Suisse. Fonction de cet écrit : protéger les changements doctrinaux et rituels déjà introduits contre une éventuelle réaction conservatrice s'exerçant par le biais du magistrat municipal, mais aussi éviter que le changement religieux serve de prétexte à un affranchissement de contraintes éthiques, fiscales par ceux sur qui elles pèsent le plus, ou à un essai d'actualisation d'une utopie évangélique.
L'écrit est tout entier organisé autour d'une distinction fondamentale entre la « justice divine » et la « justice humaine » : celle-ci ne dérive pas immédiatement de celle-là et ne permet pas de satisfaire à ses exigences, mais elle continue d'y trouver la source de ses modalités. Cette distinction est l'argument autour duquel Zwingli organise sa défense doctrinale contre de multiples fronts adverses.
Dieu « est » la justice : il se révèle tel dans sa Parole - l'Écriture - dont les indications l'emportent sur toute prescription « humaine ». Cette justice est inaccessible : elle ne s'accomplit qu'en Christ. Seul le croyant uni par la foi au Christ peut commencer d'acquérir cette justice qui se réalise donc de façon « intérieure ». Seule la vraie religion, dont il s'agit de conforter la prédication, conduit à approcher cette justice. L'impossibilité de satisfaire aux exigences divines de sainteté n'en détruit pas la pertinence ; elle dévoile la situation réelle des hommes qui ne peuvent prétendre accéder au salut par la voie de l'éthique ou de la conformité au droit. Plus, la vie en société requiert l'existence d'une autorité qui, par voie de coercition et de prévention, préservera l'ordre social. Le mandat ainsi confié aux autorités doit être respecté ; en empruntant aux indications scripturaires les éléments majeurs de leur code, les autorités ne mettront pas un terme à la disqualification initiale de toute justice humaine, mais elles maintiendront la possibilité d'une prédication et d'une audition de la vraie religion.
Zwingli veut éviter que l'échec à répondre aux exigences divines conduise à une pratique sociale symétrique inverse (cf. p. 42) : le pardon est exigé par Dieu ; il n'est pas pratiqué ; faut-il alors laisser libre cours à la vengeance ? La solution réside dans la médiation d'institutions de « justice humaine » qui rendront à chacun son dû et le protégeront. Cet ordre-là aussi peu exaltant que fondamentalement nécessaire s'impose à tous : il ne souffre ni immunité, ni exemptions, ni prétention à son dépassement par la recherche individuelle d'une perfection plus accomplie. Cette « justice humaine faible et impotente » (p. 40) est aussi la seule concevable dans son ordre. Elle est incompétente en matière de salut, mais propose des préceptes bons et utiles afin que nous vivions heureux et amicalement les uns avec les autres ». La législation esquissée est sévère, et très conservatrice, à la mesure du diagnostic moral porté sur les hommes, elle est « réaliste », par exemple en matière de dettes, intérêt et usure (cf. p. 67 s.).
Le texte de cette traduction est établi sur celui que donne le Corpus Reformatorum, t. 89 (= Zwingli Opera, t. II), p. 471 s.
On saura gré à J. C. d'avoir rappelé entre parenthèses la source de quelques hésitations du traducteur aux prises avec une langue allemande difficile. C'est là qu'on mesure l'intérêt des éditions bilingues.
Une édition donc qui donne accès à un document dans lequel est proposée une éthique sociale qui ne se constitue pas à partir du droit naturel, d'une « illumination » ou d'une analyse contextuelle. Plus précis que Luther, Zwingli nourrit moins d'ambition que Calvin en la matière et moins d'illusions que les moralistes humanistes. Le traducteur et son éditeur seront d'autant plus remerciés que la réflexion sur le lien de la religion à la vie sociale est d'actualité ! Le travail de J. C. semble faire école : signalons au lecteur de la Revue que la Fidei ratio de 1530, « Exposé de la foi », est traduite par J.-P. Gounelle dans Études théologiques et religieuses, 56e année (1981), p. 377-402.


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