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BIBLE DE TOUS LES TEMPS - La collection complète (volumes 1 à 8)

BIBLE DE TOUS LES TEMPS - La collection complète (volumes 1 à 8)

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Date d'ajout : mardi 05 septembre 2017

par Léo LABERGUE

ÉGLISE ET THÉOLOGIE, 20, 1989

Moyen Âge et Bible : il est important de tenir compte de cette dualité présente dans le titre. Il ne suffit pas de lire des textes anciens pour les comprendre. Bien des éléments du contexte vivant risqueraient de nous échapper. Une bonne connaissance du Moyen Âge aide à comprendre quel usage on faisait de la Bible ; une bonne connaissance de la Bible aide à percevoir le meilleur et le pire dans l'usage qu'on en fait à telle époque donnée. Les responsables de cet ouvrage indiquent leur propos à la p. 11 : « nous voulons montrer comment au Moyen Âge on a reçu, compris la Bible, quelle a était influence de l'Écriture sainte sur l'enseignement, les institutions, les mentalités médiévales. » À noter que le Moyen Âge dont il est question ici se limite à l'Europe occidentale sous influence latine.
Un chapitre préliminaire traite de l'évolution des « noms de la Bible » : bibliotheca, biblion-biblus, scriptura, pagina, biblia. Testamentum, sans oullier les glosae et postillae.
Quatre sections se partagent les vingt-trois autres essais ou chapitres du volume : I. Le livre (inventaires, versions et révisions, gloses, concordance verbale, traductions en Grande-Bretagne) ; II. Étudier la Bible (instruments et méthodes, l'exégèse au XIIe siècle, l’exégèse à l'Université [XIIIe-XVe siècles). l'exégèse juive, l'usage monastique) ; III. Vivre la Bible (une première partie traite du « gouvernement » : dans les Règles et Coutumiers, dans les Collections canoniques et chez les canonistes, puis dans la vie politique : une seconde partie traite de la « pastorale » : imagerie biblique. usage des apocryphes, modèles bibliques employés en hagiographie, prédication en langues vernaculaires et en langue latine. usage en liturgie) ; IV. Bible et nouveaux problèmes de chrétien/é (« Monnaie, commerce et population », « La Bible dans les confréries et les mouvements de dévotion », « Les communautés hérétiques » ).
Ouvrage d'érudition, instrument de recherche, invitation au travail : voilà un ouvrage intéressant, important, qui ne pouvait viser à donner une synthèse ou à faire le point sur toutes les questions abordées.
Dans la présentation de la troisième section, on signale qu'une étude des pénitentiels devait être faite par Cyrille Vogel. Le décès de l'auteur explique l'absence de cette étude. Par les pénitentiels on aurait eu, pour le moins, une idée plus précise de la relation entre l'Écriture et la réflexion concernant la vie, qu'il s'agisse de morale de vie sacramentaire ou même de vie quotidienne.
Un effort sérieux a été fait pour tenir compte de la « vie de tous les jours », de la religion populaire, de la vie sociale, mais il reste encore beaucoup à faire pour mieux comprendre l'impact de ces recherches. Je crois que l'ouvrage nous fournit un instrument de travail précieux, rédigé par des médiévistes. Il aurait sans doute été intéressant de joindre un essai axé sur l'histoire de l'exégèse biblique : points forts et points faibles de la lecture et de l'interprétation de la Bible ; importance pour l'AT de la fixation du texte hébreu tel que transmis par les Massorètes (IXe siècle), même si cela demandait d'élargir quelque peu l'horizon « occidental » de l'ouvrage.
L'importance du passage du latin aux langues vernaculaires, surtout pour les langues non latines est bien soulignée. Il est facile de reconnaître que le besoin de traductions a exercé une influence notable sur la formation des langues germaniques et anglo-saxonnes, besoin perçu bien autrement par les clercs du domaine des langues latines. À ce propos, les chapitres rédigés par Michel ZINK et Jean LONGÈRE sur la prédication méritent une lecture attentive, dans le cadre du renouveau liturgique depuis Vatican II. Le «salut par le latin» fait partie des mythes qu'une connaissance de l'histoire permet de mettre à sa place toute relative.
La Bible est beaucoup plus qu'un texte et cela le Moyen Âge l'a bien compris. La parole de Dieu conduit à Dieu, mais elle peut aussi être manipulée : elle peut malheureusement être au service d'un « pouvoir », qu'il s'agisse d'un « pouvoir » institué ou d'un « pouvoir » qui se constitue peu à peu en force d'opposition. L'accès à cette parole a pu être facilité ou contrôlé pour des motifs divers. L'histoire des traductions acceptées ou refusées, l'histoire de l'interdiction de la lecture de la Bible en fournissent des preuves irréfutables. On pensera à l'Angleterre de Wyclif et des Lollards, à Pierre Valdès et à sa postérité, sans oublier les confréries et les ordres mendiants. À propos de l'Angleterre, citons ces remarques de Micheline LARÈS : « On réserve la lecture des traductions vernaculaires aux gens cultivés qui en requièrent l'autorisation » (p. 137) et « c'est bien d'un rapport de forces qu'il s'agit, et on n'ignore pas que les traductions à usage populaire sont souvent réclamées pour servir à la prédication laïque échappant à la surveillance doctrinale de l'Église » (p. 137). Voir le bon exposé sur les Vaudois aux p. 598-606 (on aurait dû cependant faire un usage moins massif du terme « hérétiques »).
En plus de l'histoire de la transmission du texte et des versions, il est important de tenir compte de l'« interprétation » ou de l' »herméneutique » de la Bible. Bien des éléments nous sont fournis ici, par exemple par les gloses ou les notes, par les procédés « targoumiques », dont l'histoire ne tient pas toujours assez compte, par les réflexions sur l'herméneutique trouvées dans les introductions aux livres médiévaux ou encore dans les Écoles, tout spécialement chez s. Anselme (voir p. 166-171, 179). La « dialectique » médiévale se situe en plein dans cette ligne.
L'importance des quatre sens de l'Écriture est fréquemment soulignée, comme il se doit dans un ouvrage portant sur la lecture de l'Écriture au Moyen Âge.
Avec Pierre Lombard, puis avec l'Université, c'est le passage de l'Écriture à la « théologie » qui organise le donné révélé, mais en même temps s'éloigne de la lecture de la Bible. Avec Pierre le Chantre, on avait bien lectio disputatio et praedicatio, mais chez Pierre le Mangeur, les distinctiones prennent de plus en plus la place de l'explication de l'Écriture. La quaestio prend de plus en plus la place de la lectio.
Mais évitons l'illusion d'un usage monastique parfaitement soumis à la Parole : « Le moine ne paraît guère soumis à la Bible, il l'utilise plutôt pour justifier une habitude, un comportement, quitte à s'appuyer sur une citation scripturaire prise en dehors de son contexte [...]. Plutôt que d'influence de la Bible sur les règles monastiques, il vaut mieux parler d'utilisation très libre d'un réservoir de citations et de références » (Marie-Christine CHARTIER, p. 325).
Pour les collections canoniques, Jean GAUDEMENT montre bien que « la nature même de beaucoup de textes scripturaires soumet leur autorité à un certain contrôle » (p. 363). Et il cite ce passage de Gratien : « autre chose est d'exposer avec soin l'Écriture et autre chose d'imposer un terme aux litiges. La science ne suffit pas pour régler les affaires, il faut aussi le pouvoir » (p. 364). Le Décret de Gratien « fait de Rome l'arbitre du droit. Une hiérarchie des sources s'affirme qui, sans écarter le recours à la Bible, met au premier rang le Pontife romain » (p. 367).
Une étude de l'impact des croisades sur la connaissance de la Terre Sainte, pays de la Bible, aurait sans doute mérité au moins une brève considération. On a rapporté de ce pays des images nouvelles, une connaissance meilleure du milieu géographique. Des « occidentaux » s'y sont établis et nous ont laissé des écrits que l'on peut scruter.
Par ailleurs, c'est demander là autre chose que ce qu'un ouvrage déjà riche de réflexion nous a présenté.
En peu de mots, la conclusion générale (p. 615-618) nous fournit une excellente synthèse des questions et des réponses étudiées au cours des vingt-quatre chapitres du volume : elle souligne tout particulièrement l'importance que prend l'Ancien Testament à l'époque de Charlemagne, avec des effets durables pour l'interprétation de la vie dans l'Église et dans la société. Puis, avec une meilleure intelligence du Nouveau Testament, c'est toute l'Écriture qui est lue davantage comme source de conversion intérieure, de réforme par retour à la « vie apostolique ». Imitation et contemplation ne sont pas toujours bien comprises, mais par ailleurs on doit tenir compte de l'importance des mystiques et des prédicateurs aux XIVe et XVe siècles.
Il n'y a que peu d'erreurs à signaler, dont une dizaine de fautes pour le latin et cinq ou six pour le français. Je note une erreur à la p. 52 où on lit « Malachie » entre Samuel et Isaïe : il faut lire « Rois », car Malachie fait partie des « douze prophètes » (erreur attribuable à une mauvaise lecture de l'hébreu). À la p. 130 (7e ligne de la fin), il manque probablement une ligne de texte. Assimiler « Descente aux Limbes » et « Anastasis en grec » (p. 442), c'est commettre une double erreur. On ne peut pas parler au Moyen Âge de « versions yougoslaves » (p. 443). À la p. 511, la citation de Rm 13, Il doit lire propior et non proprior qui change le sens. Enfin, à la p. 517, lire « Bernardin de Sienne ».


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