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TH n°115 UNE CHAIR POUR LA GLOIRE. L'ANTHROPOLOGIE RÉALISTE ET MYSTIQUE DE TERTULLIEN

TH n°115 UNE CHAIR POUR LA GLOIRE. L\'ANTHROPOLOGIE RÉALISTE ET MYSTIQUE DE TERTULLIEN

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Date d'ajout : mercredi 07 octobre 2015

par Daniel VIGNE

REVUE : REVUE THOMISTE 2003

Cet ouvrage fera date. Non seulement parce que depuis les travaux de R. Braun, J. Moingt et J.-C. Fredouille, publiés il y a trente ans, aucune étude d'ensemble sur Tertullien n'avait vu le jour en France, mais aussi parce que J. Alexandre met en valeur un aspect essentiel de la pensée du Carthaginois, et conduit sa recherche d'une main de maître. Caro salutis est cardo: cette chair « charnière du salut » est ici envisagée successivement comme réelle, comme créée, comme animée et comme sauvée.
La première partie montre les fondements logiques de la pensée de Tertullien, et leur lien étroit avec le réalisme stoïcien. Loin de nier la consistance de la matière au profit de l'esprit, comme le fait le platonisme, Tertullien opte pour un rationalisme intégral, et prend au sérieux le concret. Il croit à l'adéquation du réel et de la pensée, de la vérité et de la connaissance, des choses et des mots qui les désignent. La chair n'est pas une apparence, mais une substance, dont les accidents et les changements n'entament pas l'unité et la permanence.
Cette partie logique pose les bases rationnelles d'une théologie de la chair comme œuvre du Dieu créateur, objet de la deuxième partie. C'est toute la polémique de Tertullien contre le gnosticisme, négateur de la création bonne, qui se trouve ici engagée, à travers une lecture attentive du récit de la Genèse. Marcion, Hermogène et les Valentiniens en sont, on le sait, les principaux adversaires. On remarque la profonde continuité entre Irénée et Tertullien, mais aussi, chez ce dernier, l'accentuation du thème de la « corporéité » - y compris en Dieu -, car « rien n'existe, s'il n'est corps » (De anima, 7, 3, cité p. 192).
Comment la partie visible et matérielle de l'homme est-elle liée à sa partie invisible, c'est-à-dire son âme ? La troisième partie, anthropologique, répond à cette question difficile. Tertullien y met en œuvre une fine dialectique où la dualité des substances est affirmée en même temps que leur inséparabilité. L'A. écarte la vision trichotomique (corps - âme - esprit), trop liée à l'élitisme gnostique, et voit seulement dans l'esprit l'aspect conscient et dynamique de l'âme, son animus insufflé par Dieu. Ici comme ailleurs, l'analyse de l'A. progresse de façon claire et convaincante, soulevant au passage une question : « Tertullien, quand il parie de l'homme, ne semble pas s'intéresser à la personne humaine, en tant que sujet personnalisé. Il parle de l'âme et de la chair » (p. 336). Le concept moderne de personne peut-il prendre place dans cette anthropologie ?
La quatrième partie, la plus longue et la plus originale, développe une mystique de la chair qui renouvelle en profondeur le problème du montanisme de Tertullien. Deux erreurs sont ici réfutées. La première consiste à séparer, même de façon progressive, le Tertullien montaniste du Tertullien catholique : ce serait oublier que « Tertullien, avant même de connaître le montanisme, en partageait l'état d'esprit et les conceptions » (p. 416). La seconde erreur serait de confondre le montanisme de Tertullien avec un spiritualisme dualiste, impliquant le mépris du corps : au contrai, re, comme le montre l'A., c'est l'extrême importance accordée à l'union de l'âme et du corps qui explique l'ascétisme du Carthaginois. La continence (qui est préférée, mais non pas opposée au mariage), le jeûne, la prophétie, l'extase, ne sont pas des façons pour l'esprit de répudier la chair, mais des moyens par lesquels la chair anticipe concrètement sa résurrection à venir, réalisant la prophétie de « l'Esprit répandu sur toute chair ».
Ce réalisme mystique éclaire bien des aspects de la pensée de Tertullien : sa christologie antidocétiste, sa conception physique de la régénération baptismale, son eschatologie de type millénariste, son rigorisme moral, son admiration pour les martyrs, etc. Dans tous ces domaines, la conviction qui est à l'œuvre est que « sur la vérité de la chair repose tout l'édifice de la foi » (p. 342). Le christianisme de Tertullien est « une mystique de la chair en laquelle est descendu l'Esprit » (p. 525). Aucune étude ne l'avait établi de façon aussi ample, documentée et limpide.
Le livre de J. Alexandre ne tardera pas à devenir un « classique ». S'il vient à être réédité, est-il permis de demander que les citations de Tertullien soient imprimées en caractères un peu plus grands ? Elles le méritent.


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