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DE SCHOPENHAUER À FREUD. L'INCONSCIENT EN QUESTION

DE SCHOPENHAUER À FREUD. L\'INCONSCIENT EN QUESTION

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Date d'ajout : jeudi 28 février 2008

par Martiel Darc

LECTURE : De Schopenhauer à Freud, l'Inconscient en question.
Editions Beauchesne, 2007
Voici un livre d'une portée rare quant aux questions qu'il soulève et d'une grande rigueur quant aux matériaux qu'ils rassemblent. Nous vous en conseillons hautement la lecture. Une bibliographie est disponible à la fin. C'est un livre qui fera date.
A noter qu'il y a deux type de citation : en marron, les propos de Jean-Philippe Ravoux et en bleu celle d'auteurs cités par Ravoux.
Paris-philo VIII

Les pourquois d'une étude : celle de Jean-Philippe Ravoux

Il ne s'agit pas avec ce livre d'une attaque contre la psychanalyse mais d'une étude très approfondie et sans doute l'une des plus remarquables sur l'Inconscient et le recours par Freud à ce concept. La recherche de l'auteur est partie de cette phrase de Jérôme Deshusses sur la psychanalyse : il est caractéristique qu'aucun philosophe n'est osé en démasquer l'incohérence spéculative totale, le vide philosophique et parfois la malhonnêteté intellectuelle (Délivrez Prométhé, Paris, Flammarion, 1978). Ravoux fait ensuite remarquer qu'en tant que théorie non scientifique, elle n'est pas réfutable, c'est ce qui fait d'ailleurs la force de la psychanalyse, puisque l'on est dans le domaine de la croyance et des affects. Pour étayer cela, l'auteur fait un détour par Popper : Le critère de la scientificité d'une théorie réside dans la possibilité de l'invalider, de la réfuter ou de la tester, Popper ajoutait quant à Freud : Une grande partie de ce qu'il avance est décisif et tout à fait susceptible de trouver une place, ultérieurement, dans une psychologie scientifique se prétant à l'épreuve des tests. ... en revanche... les observations cliniques dont les analystes ont la naïveté de croire qu'elles confirment leurs théories ne sont pas plus en mesure de le faire que les confirmations que les astrologues croient, quotidiennement, trouver dans leur pratique. Pour Popper une théorie n'est donc pas absurde ou sans intérêt même si elle n'est pas scientifique. Nous ne retraçons pas le parcours de Jean-Philippe Ravoux qu'il expose lui-même très bien tout au début de son livre.

Les raisons d'une démarche : celle de Freud.

Au-delà de la conviction : Si Sigmund Freud n'avait pas été frappé d'ostracisme par la société autrichienne, par l'Université et par la Société des médecins, s'il n'avait pas été, de ce fait, écarté des domaines propres à la science et poussé à chercher d'autres méthodes que celles de la science, s'il n'avait pas, dès lors, succombé à son goût pour la spéculation, au lieu de maintenir son intérêt pour la biologie, la physiologie et la neuropathologie, il aurait sans doute discerné que ces questions renvoient à celle de la mémoire, à celles de la constitution, de la rétention et de l'évocation des souvenirs. Cependant il nous faut reconnaître que tout ce à quoi s'intéresse la psychanalyse correspond à quelque chose de bien réel et qu'il est urgent que nous nous en donnions une connaissance effective et objective si nous voulons élaborer des stratégies aptes à mettre un terme à un trouble dans la tête, du moins en ce qui concerne les névroses et les perversions puisque nous savons, aujourd'hui, que les psychoses relèvent de la psychiatrie.
Neurologue de formation, mais dans l'impossibilité, après son séjour chez Jean Charcot, d'accéder aux laboratoires de recherche, Freud ne s'est pas résolu à l'idée que ses théories ne puissent s'expliquer en termes de structures et de fonctions du cerveau. Sans connaissances approfondies sur l'anatomie du cerveau et surtout sur sa physiologie, il n'avait pas les moyens de développer son projet de psychologie scientifique et c'est ce qui l'a conduit à concevoir les topiques et l'économie libidinale sur le mode théorique. Pour moi, c'est là que le désir de gloire, évident et, je dis, compréhensible, a joué le rôle d'un véritable obstacle épistémologique. Reconnaître les découvertes d'Arthur Schopenhauer, c'était enlever à sa propre théorie tout ce qu'elle pouvait avoir d'original. Il y a tout une obsession de la gloire, chez Freud, non personnelle, mais pour sortir de la communauté juive, pour montrer ce dont elle était capable.
La psychanalyse fut contrainte, par l'étude des refoulements pathogènes ainsi que par d'autres phénomènes, de prendre le concept d'Inconscient au sérieux (citation d'Alasdair Mac Intyre, L'inconscient, analyse d'un concept, PUF). Insistons sur le terme de sérieux puisque « C'est par abstraction qu'il va séparer artificiellement le processus psychique du processus psychophysiologique où, pourtant, il trouve son sens et sa signification. » La psychanalyse en est venue à subdiviser, encore, l'Inconscient reconnu par elle, en un préconscient et en un Inconscient proprement dit (Ravoux cite un auteur peut-être Freud ou Alasdair Mac Intyre, L'inconscient, analyse d'un concept, PUF) : La subdivision de l'Inconscient est liée à la tentative de se représenter l'appareil psychique à partir d'un certain nombre d'instances ou de systèmes et de rendre compte des relations qu'ils entretiennent entre eux dans un langage spatial, ce qui n'implique nullement qu'on cherche à la mettre en connexion avec l'anatomie cérébrale (citation de Freud semble-t-il). On pourrait remarquer, d'ailleurs, que la résistance et l'amnésie sont des phénomènes reconnus par les philosophes depuis Platon, comme est admise une activité psychique inconsciente, mais qu'il n'y a pas, chez les philosophes, de spéculation sur l'Inconscient, car ou bien l'Inconscient est et l'on ne peut rien en dire, ou bien il n'est pas et l'on est ramené à la conscience et à la mémoire avec les mécanismes d'oubli et de réminiscence, à moins qu'il faille considérer alors le corps.

Les théories philosophiques antérieures qui ne nécessitent pas l'emploi du concept d'inconscient : celles de Schopenhauer

La théorie d'Arthur Schopenhauer est, aujourd'hui, plus crédible que celle de Freud parce qu'elle prédit correctement le résultat des observations et que ces prédictions sont confirmées par tous les travaux qui se font aujourd'hui en neuro-physiologie et en neuro-pathologie, dans les perspectives ouvertes par Arthur Schopenhauer :
l. Le paragraphe 36 du Livre III du Monde comme volonté et comme représentation, où il dit la genèse de la folie.
2. Le chapitre XXXII des Suppléments, De la folie2, chapitre dans lequel se trouve la page que Otto Rank fit lire à Sigmund Freud, où il explique les mécanismes de la folie.

En effet Freud connaissait l’œuvre de Schopenhauer, qu'il avait oubliée et sur laquelle il est revenu entre 1914 et 1917, après qu'Otto Rank lui ait fait lire le chapitre XXXII, en 1906.

Pages 67 et 69 Ravoux donne les principaux passages où Freud fait directement référence à Schopenhauer.

En 1914, dans Contribution à l'histoire du mouvement psychanalytique, Sigmund Freud écrit: A coup sûr, lorsque je conçus cette doctrine du refoulement, mon indépendance était entière. Aucune influence, que je sache, ne m'avait incliné vers elle. Je tins donc mon idée pour originale jusqu'au jour où Otto Rank me montra, dans le Monde comme volonté et comme représentation, le passage où le philosophe s'efforce d'expliquer la folie. [...] Ce que, dans le texte que me montrait Otto Rank, Arthur Schopenhauer dit de la manière dont nous nous raidissons pour refuser d'admettre une réalité pénible, est rigoureusement superposable à ma théorie du refoulement. En 1917, dans Une difficulté de la psychanalyse, Sigmund Freud remarque que d'éminents philosophes peuvent être cités pour ses devanciers (de la psychanalyse), avant tout autre le grand penseur Schopenhauer, dont la volonté inconsciente équivaut aux instincts psychiques de la psychanalyse. C'est ce même penseur, d'ailleurs, qui, en des paroles d'une inoubliable vigueur, a rappelé aux hommes l'importance toujours sous-estimée de leurs aspirations sexuelles.
Alors on doit se poser la question de savoir s'il a lu ou non l’œuvre d'Arthur Schopenhauer et, s'il la lue, ce qu'il en a retenu consciemment ou inconsciemment. Question qui pourra paraître, à certains, inutile puisque Sigmund Freud lui-même y répond en reconnaissant les larges concordances de la psychanalyse avec la philosophie de Schopenhauer : il n'a pas seulement soutenu la thèse du primat de l'affectivité et de l'importance prépondérante de la sexualité, mais il a même eu connaissance du mécanisme du refoulement. Et il ajoute que ces concordances ne peuvent se déduire de sa familiarité avec sa doctrine puisqu'il a lu Schopenhauer très tard dans sa vie (Introduction philosophique à l’œuvre de Freud, Ramonville, Erès, 1990 pp. 57-75). Or, non seulement la théorie d'Arthur Schopenhauer est originale, dans tous les sens du terme, mais, plus encore, elle me semble tout aussi pertinente que la théorie freudienne, sans en avoir les défauts et les conséquences fâcheuses.

Une théorie sur la mémoire peut complètement se substituer à celle de l'Inconscient :

L'Inconscient est superposable à l'une des quatre mémoires que nous allons rapidement retracer, mais nous vous invitons à lire les passage du livre de Jean-Philippe Ravoux (_73-75) : la mémoire permanente, que l'on peut dissocier comme le font les neurologues en mémoires procédurales et mémoires déclaratives.
Les mémoires procédurales sont ce qu'on appelle les mémoire-habitudes, elles tiennent de nos dispositions et de nos capacités, ce sont notamment les reflexes contenus dans le bulbe rachidien. Les mémoires déclaratives ont des contenus accessibles par la conscience et sont restituables par le langage, d'où l'adjectif de déclaratif. D'une part il y a la mémoire sémantique avec ses mots et ses concepts ainsi que des connaissances de tout ordres : géographiques, scientifiques, techniques, etc. ... D'autre part, la mémoire épisodique qui contient des évènements et des épisodes datés dans le temps. Enfin, le quatrième type de mémoire n'est pas permanent, il s'agit de la mémoire transitoire ou de travail, celle qui nous sert, au quotidien, de memento ou de pense bête.
Si l'analyse faite par Arthur Schopenhauer évoque toutes les mémoires, elle porte principalement sur la mémoire épisodique qui joue, dans la conception qu'il nous donne de la folie, le rôle dévolu l'Inconscient par Sigmund Freud. ... Il est alors possible d'envisager l'Inconscient dans une perspective neuro-anatomique : le souvenir refoulé n'est plus alors qu'un souvenir dont les connexions synaptiques ont été détruites après la mise en mémoire. C'est cette conception que nous trouvons chez Arthur Schopenhauer lorsqu'il explique comment et pourquoi la rupture de l'enchaînement continu des souvenirs entraîne la folie.


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