Editions BEAUCHESNE

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01. MANIFESTATION ET RÉVÉLATION

01. MANIFESTATION ET RÉVÉLATION

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Date d'ajout : mardi 22 août 2017

par Jean ONIMUS

REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE, avril 1979

Six études fort diverses, réunies par un thème commun, celui de la Révélation de Dieu, et qui vont de la notion de théophanie chez Duns Scot, par Jean Trouillard, à une réflexion du P. Tilliette sur l'ontologie phénoménologique de Michel Henry. Mais le « massif central » qui domine l'ouvrage de ses 130 pages, est l'étude vraiment magistrale du P. Dubarle intitulée : « Révélation de Dieu et manifestation de l'Esprit dans la philosophie de la religion de Hegel ». Sujet difficile entre tous, et qui a fait reculer bien des commentateurs. L'auteur s'est reporté directement aux textes originaux, en se fondant non seulement sur les Leçons sur la Philosophie de la Religion mais sur l'ensemble de l'œuvre où il évolue avec une déconcertante aisance. Cette relecture explicative et critique de textes célèbres est tout à fait passionnante ; elle est claire et sa qualité pédagogique dénote un cours d'Université. Il s'agit, on le sait, d'un point central, germinal, dans la pensée du théologien que fut Hegel : une rationalisation de la révélation chrétienne qui l'élève au niveau du concept et l'intègre à l'ontologie dialectique. Achever la foi en savoir, extraire des données sensibles et contingentes de la Révélation les nécessités ontologiques qu'elle dévoile tout en les masquant, y retrouver le « témoignage de l'Esprit », en constater la vérité absolue, transférer les représentations religieuses dans le langage de la spéculation, tel est le grandiose et téméraire projet du philosophe. Après avoir analysé cette assimilation philosophique de notions telles que la Trinité, la Création, l'Incarnation, la Passion (qui entrent si bien dans l'ontologie de Hegel), l'auteur s'engage, en terminant, dans la critique d'une pensée qui, en voulant intégrer l'essence du Christianisme à sa dialectique rationnelle, tend à exclure le surnaturel. Il n'y a plus de moyen terme entre les illusions naïves du récit historique et la connaissance nécessaire, évidente des vérités qu'il comporte. L'auteur oppose à ce dilemme la connaissance obscure des prophètes. Au fond, Hegel ne fait du Christianisme la religion absolue qu'à condition de diviniser l'homme. La reprise par la pensée spéculative des données de la Révélation est en quelque sorte (malgré les intentions de Hegel) profanatrice : on ne réduit pas la foi à l'évidence du concept ; c'est passer d'une épistémologie à une autre, radicalement différente. Le Dieu que rencontre la foi n'est pas l'Absolu ontologique, même si l'on conçoit cet Absolu à la façon (dialectique) de Hegel. En se fondant sur l'unité de la nature divine et de la nature humaine, et ce qu'il faut bien appeler le « devenir homme de Dieu », Hegel rend compte logiquement de ce que le Christianisme propose à notre croyance. Mais, ce faisant, il détériore le Message par la nécessité même qu'il y introduit. Cette étude, on le voit, aborde des choses fondamentales ; l'effort puissant de compréhension et l'élucidation fourni par l'auteur rend aisément accessible au lecteur non initié une pensée réputée obscure. Il est regrettable que cet important article soit pris en sandwich entre des études d'un tout autre ordre. Nous attirerons cependant l'attention sur l'excellente introduction à la thèse de Michel Henry sur l'Essence de la Manifestation que nous donne le P. Tilliette. D'abord parce que les commentaires sur Henry ne pullulent pas (sa thèse date de 1963), ensuite parce que cette pensée labyrinthique gagne à être médiatisée par un commentateur de cette qualité. Le titre : « Notes sur la philosophie de Michel Henry » est trop modeste : l’auteur (tout en annonçant les aspects qu'il laissera tomber) s'efforce de repenser personnellement l'ouvrage. Il montre comment Henry se sépare de la phénoménologie rationnelle de Descartes parce qu'elle part de l'ego (comme toute la philosophie moderne du sujet-conscience) : son projet est de fonder directement une ontologie phénoménologique. Au lieu de partir d'un étant, d'une chose telle que l'ego, il s'agit d'appréhender la présence absolue, l'immanence radicale de l'être. Ce qui amènera, en fin de parcours, à retrouver l'ego-l'ipséité de l'ego absolu. Le problème est donc celui de la visibilité de l'être, de sa phénoménalisation c'est-à-dire de sa distanciation. C'est ce fond d'Être, sur lequel brillent les étants, qu'il s'agit de faire apparaître. Car l'essence de la manifestation se dissimule derrière les phénomènes : nous sommes en pleine philosophie de l'immanence et, comme on pouvait s'y attendre, elle débouche sur l'affectivité.
Mais le sens du mot reste obscur : c'est un pur sentir, essence de la vie, essence de la subjectivité, expérience originaire, par laquelle l'être est immédiatement son phénomène sans moyen terme. Affectivité absolue, qui est souffrance mais aussi parousie, dénuement mais aussi réalisation - presque caresse. Fond ultime du désespoir par lequel on rejoint l'absolu. Philosophie étrange, ambiguë, où l'on reconnaît aisément Hegel, Fichte, Husserl, Heidegger... mais qui entraîne en des régions presque inexplorées, dans ces déserts de l'être où l'absolu coupe le souffle et éteint la vie.
Au seuil du recueil, une très érudite et sympathique étude de J. Trouillard sur ce fou de Dieu que fut Duns Scot. On sait que pour lui (mais en des termes bien différents de Hegel) l'homme « est » Dieu et médiatise le divin. Même sans la chute, Dieu devait s'incarner pour diviniser le monde en le consommant en Lui. Toute une théologie unitive et négative en résulte car Dieu n'est pas manifestable : la connaissance n'est jamais que le signe d'autre chose, d'un contact initial mais ineffable qui n'est donné qu'aux innocents - aux ignorants. La place manque pour parler convenablement des autres articles mais ces quelques notes donnent une idée de la richesse et de l'intérêt du volume, non seulement pour les théologiens mais pour les historiens des idées et pour tous ceux que préoccupent les mystérieuses relations de l'être absolu avec l'être participé.


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