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TH n°110 LA VOIE DE LA VIE. ÉTUDE SUR LA CATÉCHÈSE DES PÈRES DE L'ÉGLISE

TH n°110 LA VOIE DE LA VIE. ÉTUDE SUR LA CATÉCHÈSE DES PÈRES DE L\'ÉGLISE

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Date d'ajout : samedi 17 octobre 2015

par Philippe HEINE

REVUE : MÉLANGES DE SCIENCE RELIGIEUSES

Ce petit ouvrage a pour but de retracer l'histoire et le développement de la doctrine des deux voies, c'est-à-dire de ce thème de la voie du bien et du mal. Célèbre dans le judaïsme tardif, repris par le Christianisme cette symbolique moralisante a des racines profondes dans l'Orient et connut un grand succès par la suite. L'originalité de cette étude est d'avoir voulu chercher les traces anciennes de cette doctrine dans les cultures en contact : avec les juifs. L'ouvrage peut se diviser en trois grandes parties : les cultures antiques (l'Egypte ancienne, Zarathoustra, la Grèce antique, soit les trois premiers chapitres), ensuite l'Ecriture sacrée (l'Ancien Testament, les écrits intertestamentaires, le Nouveau Testament, soit les chapitres 4 à 6), enfin le corpus patristique (chapitres 7 et 8), avec une réflexion sur la possible utilisation de la symbolique des deux voies dans la liturgie du baptême (chapitre 9). Dans ces différents chapitres l'auteur est attentif au développement diachronique et à la possible inculcuration des ces éléments, c'est-à-dire de leur adaptation au milieu ambiant.
Dans l'Egypte ancienne, les deux voies s'ouvrent dans l'au-delà, ou, comme l'écrit l'auteur, dans "l'outre-tombe", donc pas pendant la vie terrestre. Zarathoustra rejeta la fatalité astrale, mais insista sur la liberté de choix et d'action, ce qui explique sans doute le succès de son enseignement. Hésiode est le premier à montrer la vertu comme une vie montante et malaisée. Pythagore symbolisa la doctrine des deux voies dans la lettre upsilon : en majuscule, elle présente un bras se divisant en deux vers le haut. Platon développa la dimension eschatologique de cette doctrine ; il établit également l'anthropologie de la responsabilité. Plutarque est un bon témoin de l'influence dominante du dualisme platonicien au début du Ile siècle.
Dans la Bible, l'expérience décisive, c'est l'Exode ; la théorie des deux voies se développa surtout dans le milieu culturel des sages; cependant, dans le jardin d'Éden, se dressent deux arbres; l'auteur propose une explication originale pour le deuxième arbre. A Qoumrân, c'est le dualisme anthropologique qui domine ; les deux voies correspondent à deux esprits. Tout cela se déploie sur un arrière-plan cosmologique avec le risque d'une dérive vers un dualisme ontologique. Dans le Premier Hénoch, c'est l'eschatologie qui prédomine, les deux voies ne sont plus qu'un thème accessoire pour le jugement final. Le Testament d'Aser présente un dualisme moral. Il serait un point de contact entre le judaïsme et le christianisme.
Philon, lui, unit les traditions juives et hellénistiques. Dans le Nouveau Testament, les allusions sont claires ; Le Christ n'est-il pas la voie ?
Dans la littérature patristique, le thème des deux voies est bien attesté ; il rentre dans la tradition essentiellement chrétienne. Dans la Didachè, comme dans la Lettre de Barnabé, c'est un procédé pédagogique pour la catéchèse. Dans les Pseudo-clémentines, le dualisme est davantage marqué et se situe entre l'essénisme et le manichéisme. Chez les Pères, le thème des deux voies constitue donc un cadre traditionnel pour l'enseignement moral chrétien, mais il perd du terrain tout d'abord à cause de la marginalisation des communautés judéo chrétiennes et ensuite par peur de toute tendance hérétique gnostique dualiste.
La doctrine des deux voies a probablement structuré la liturgie baptismale, mais le dualisme est évité, car il reste le choix personnel dans la foi.
Cet ouvrage est donc une vaste étude bien documentée qui situe la doctrine des deux voies dans un contexte plus large. L'originalité de chaque approche apparaît donc plus clairement et la spécificité chrétienne est mieux perçue dans ses nuances comme dans ses fondements.


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