REVUE : REVUE D'HISTOIRE ET DE PHILOSOPHIE JUIVE

Des volumes parus jusqu'ici du Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, voici le plus imposant : plus de sept cents notices, près de cent cinquante collaborateurs. Il couvre en effet Un champ très vaste - les diverses confessions chrétiennes et le judaïsme, mais aussi tout personnage ayant contribue « aux débats sur les sciences religieuses », ce qui englobe pour cette époque, entre autres, fondateurs de l'orientalisme, médecins, psychiatres et naturalistes, prophètes socialistes, ténors de la libre pensée… Il a donc fallu se limiter à un long XIXe siècle, en promettant « un second volume qui accueillera les personnages dont l'œuvre soit dans son intégralité, soit dans sa partie la plus importante, est postérieure » à 1914. La structure globale de l'entreprise entraînait d'autre part un risque de redondance. Les volumes sont distribués, comme on sait, en deux séries, Dimension régionale et Groupes-Institutions (en fait une catégorie composite : confessions, ordres religieux, secteurs d'activité) ; ainsi tel individu peut déjà faire l'objet de deux notices dans les tomes précédents, s'il s'agit par exemple d'un exégète protestant alsacien ou d'un théologien jésuite lyonnais. La difficulté est tournée en réduisant au minimum indispensable les données biographiques et en focalisant sur « l'apport aux sciences religieuses ». Des notices, généralement denses et nuancées, sont bien entendu consacrées aux figures les plus connues, mais l'ouvrage sera surtout précieux pour les oubliés et les occultés, ceux qui ne jouirent que d'une réputation fugace dans des cercles restreints et dont l'œuvre paraît depuis longtemps obsolète. Au gré de ses intérêts propres, chacun pourra regretter tel oubli, et on relèvera quelques coquilles ou erreurs (rares, il est vrai, pour un ouvrage de cette dimension et que le contexte fait apparaître à l'évidence : v., par exemple, p. 51, Bergson à l'École Normale, 1878 et non 1868 ; p. 212, mort de Dupuis, 1808 et non 1989 ; p. 512, mort de Paquier 1936 plutôt que 1926 ?) dans les dates. Mais, tel quel, l'ouvrage constitue désormais l'instrument prosopographique le plus complet et le plus fiable dans ce secteur.
Maître d'œuvre de cette périlleuse entreprise, François Laplanche ne s'est pas contenté de prendre en charge lui-même près d'un quart des notices, témoignant d'une érudition qui déborde largement le domaine - l'histoire de l'exégèse - dont il est le spécialiste incontesté. Une introduction retrace en une vingtaine de pages le parcours de ces disciplines, de la « science catholique » de Lamennais et des mennaisiens aux enjeux et aux retombées, scientifiques et humaines, de la crise moderniste. Sa densité résiste à toute analyse dans le cadre d'un compte rendu. Disons seulement qu'elle remplit admirablement l'objectif qu'elle assigne à l'ensemble du volume : « stimuler la recherche sur l'histoire du christianisme au XIXe siècle ».