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12. LOUIS VEUILLOT suivi de Témoignage d'Emile Poulat

12. LOUIS VEUILLOT suivi de Témoignage d\'Emile Poulat

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Date d'ajout : mercredi 23 décembre 2015

par Jacques GADILLE

Louis Veuillot, l'intransigeance d'une plume redoutable. Du journaliste il disait que le talent c'est la promptitude, le trait, avant tout la clarté. Pierre Pierrard retrace l'itinéraire d'une figure de converti dans le catholicisme du XIXe siècle.
Historien de la société et de la vie religieuse de la France du XIXe siècle, Pierre Pierrard déploie toutes les ressources de son talent et de sa vaste culture à restituer un autre grand talent d'écrivain et de journaliste du siècle passé. Ce portrait de Louis Veuillot sait éviter les écueils d'une interprétation historique « engagée » et tendancieuse, que dénonçait Émile Poulat, voilà une douzaine d'années. C'est là le fruit d'une longue fréquentation de la documentation étendue des Œuvres complètes en 40 volumes, ce « monument édifié par François Veuillot en mémoire de son oncle », des correspondances conservées à la Bibliothèque nationale, du fonds Eugène et François Veuillot conservé à l'Institut catholique de Paris,.
Mais ce résultat est dû aussi au parti de placer sous une lumière crue les outrances qui émaillent la politique « indépendante» du rédacteur en chef de L'Univers qui a mis sa. plume redoutable au service d'une cause exclusive -, la liberté de l'Église et de son chef,· vue comme la source de toutes les autres libertés.
De là, les campagnes d'invectives non seulement contre la presse anticléricale, mais aussi ses exécutions injustes contre les « libéraux » et les catholiques coupables de pactiser avec eux : Thiers, ce « tout petit homme », qu'il compare à « la taupe », Lamartine dont il écrit, à sa mort, en 1869, que « sa vie apparaît comme un gaspillage immense », Mgr Dupanloup enfin son adversaire singulier, auquel il ne peut s'empêcher, la tombe à peine refermée, de décocher ce trait : « En somme, il ne fut dans la vie qu'un de ces passants remarquables qui n'arrivent pas ! »
La « xénophobie à la française »
Au-delà des personnes, l'intolérance s'exprime à l'endroit des juifs, des protestants, de l'orthodoxie, qui est pour lui « l'islamisme de notre temps »… Il y a là des accents qui annoncent Drumont et qui sont le triste apanage de cette « xénophobie à la française », dont les excès ont souvent provoqué l'étonnement de nos amis étrangers. Pierre Pierrard jalonne avec précision les étapes de cette politique partisane (« le parti de Dieu, de l'Église, du peuple, le parti catholique »…), l'hostilité à la IIe République, au compromis de la loi Falloux (1850), le ralliement à Louis-Napoléon Bonaparte, suivi, en 1860, de la rupture sur la Question romaine qui entraîna la longue suspension de L'Univers jusqu'en janvier 1867, enfin les brèves suspensions de 1874 qui signalèrent son opposition au gouvernement de Broglie. Nul n'a sans doute mieux résumé qu'Ozanam les effets négatifs de cette intransigeance personnelle, « …Elle ne se propose pas de ramener les incroyants mais d'ameuter les passions des croyants… » (cité p. 7).
Mais s'il ne voile aucunement les côtés néfastes de « l'effet Veuillot », le livre explique les sources de cette incontestable influence, particulièrement auprès de ses « chers curés de campagne », qui ont fait, notamment au moment du premier Concile du Vatican, le succès des souscriptions lancées dans le journal pour soutenir le Pape contre les adversaires de l'infaillibilité. Pierre Pierrard consacre à l'homme et à l'écrivain des pages vivantes et neuves, au début et à la fin de son ouvrage : « …Le talent du journaliste, c'est la promptitude, le trait, avant tout la clarté. Qu'il se hâte, qu'il soit net, qu'il soit simple. » (Cité p. 35,)
L'amateur de bonne chair.
Sous le style, c'est l'homme qui apparaît, dans sa puissante carrure de Bourguignon, amateur de bonne chère et de bons vins (de Bordeaux !). Sous la rudesse du caractère se découvrent le besoin vital d'amitiés, le goût des riches demeures - du noble faubourg aux châteaux de province où il noue des relations féminines, que prolongent des correspondances.
Dans ces relations humaines, une part de choix revient aux affections familiales : ses frère et sœur, Eugène, son collaborateur le plus proche, et Élise, sa conseillère ; sa femme Mathilde, ses six filles. Or, cette vie familiale fut lourdement éprouvée par les deuils : de 1852 à 1855, il perd successivement sa femme et quatre de ses enfants. Face à l'épreuve, le converti de 1838 réagit dans la fidélité à sa foi. Sur cette dimension de la qualité spirituelle de ses écrits, quelques touches auraient gagné à être ajoutées. Ainsi, quelques mois après ses premiers deuils, confiait-il à l'une de ses amies, la comtesse Ernest de Montsaulnin, ces lignes d'une transparence admirable : « Ah, madame, on nous ordonne d'aimer le prochain comme nous-mêmes. Si nous aimions le bon Dieu seulement comme cela, - ce qui n'est guère cependant pour lui, quels saints nous serions, et avec quel dédain nous considérerions tout ce qui nous afflige. Mais, malheureux que nous sommes - est-il rien à quoi nous soyons autant attachés qu'à nos maux et qui nous fasse autant de plaisir que de nous plaindre et de pleurer ! » (Lettre du 12 juin 1853.)
L'apogée de cette influence a coïncidé assez exactement avec le temps, plus que trentenaire (1846-l878) et surtout avec le style du pontificat de Pie IX - le Pape du Syllabus et des réserves contre « l'esprit moderne ». Cette juste observation de l'auteur doit être rapprochée de l'intéressant témoignage d'un autre bon connaisseur de Veuillot et du courant qu'il incarne, Émile Poulat. Celui-ci y reprend en effet ses considérations sur « Louis Veuillot posthume et la querelle de sa postérité », demandant in fine « comment faire droit sans s'y asservir à la nouveauté du monde et de l'histoire dont nous sommes les acteurs ».
L'historien incline à penser que la question restera posée, opposant à tout essai de réponse rationnellement satisfaisante cette explication conjoncturelle. Ainsi, dès juin 1884, un bon observateur du catholicisme en France, le futur cardinal Bourret, estimait qu'il fallait objecter à la politique de Veuillot que « les temps (étaient) changés ». Reprochera-t-on à une telle position de verser dans un relativisme facile ? Ce serait oublier l'essentiel paradoxe que vivent les chrétiens, surtout les convertis de la trempe d'un Veuillot, d'un Léon Bloy ou d'un Péguy, lorsqu'ils en viennent à confronter les réalités du monde à la radicalité de leur foi.


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