À feu et à « Crocs », le deuxième Wagner

De Michel Wagner, on sait qu’il est né à Arlon il y a soixante ans, qu’il est traducteur de profession, flûtiste concertiste et que L’Apparence de la mort, paru en 2009, un premier roman remarqué qui se passait dans les tranchées de la Grande Guerre, a révélé en lui un authentique écrivain. Ce que confirme ce recueil de nouvelles et de récits, Les Crocs. Son style possède en effet une force peu commune qui, dès la première phrase, nous happe dans un monde vivant, réel, fait de chair et de sang, de sentiments et d’(in) humanité, à l’écriture à la fois précise et évocatrice. Au fil de ces dix-huit textes, il est souvent question de battues et de sangliers, ainsi que d’Hubert, le patron des chasseurs. Et aussi – on reste dans les armes à feu -, des deux conflits mondiaux, le premier avec ses soldats tombés au champ d’honneur que des « déterreurs » plus ou moins bien intentionnés tentent de retrouver – et de monnayer -, le second avec ses opportunistes et délateurs, ses filles tondues en guise d’expiation, l’un et l’autre reliés entre eux par Kern père et fils. Autant d’univers traversés de loin en loin par un « je » qui pourrait parfois être Wagner lui-même et excellemment recréés par quelqu’un qui, chacune de ses pages en témoignent, aime la littérature.

M.P.